821, 29 mai. — Nimègue.

Pépin Ier, avec le consentement des moines, échange avec l'évêque de Cahors Angarius, agissant à ce titre, la « cella » de Saint-Martin de « Jonant » qu'il reçoit de celui-ci contre des « villae » que son père, Louis le Pieux, avait acquises du comte Autricus, savoir la « villa » de La Cassagnole sise en Rouergue, et d'autres situées en Quercy, en particulier « Bulliensis ».

Référence : Léon Levillain et Maurice Prou (éd.), Recueil des actes de Pépin Ier et de Pépin II rois d'Aquitaine (814-848), Paris, 1926, no2.

A. Original perdu.

B. Analyse du xviie ou du xviiie s., Archives départementales du Lot, F 249, p. 146.

C. Analyse du xviie s., par l'abbé de Foulhiac, dans sa Chronique manuscrite de Cahors, p. 70.

D. Analyse du xviie s., par Guillaume Lacoste, dans son Histoire générale de la province de Quercy, t. I, p. 290.

E. Analyse de l'an 1617, par Guillaume de La Croix, dans ses Series et acta episcoporum Cadurcensium, p. 43.

a. Guillaume de La Croix, Series et acta episcoporum Cadurcensium. Voir ci-dessus, sous la lettre E.

b. L. Ayma, Histoire des évêques de Cahors par Guillaume de La Croix, t. I, p. 181, note 2, d'après C.

c. Guillaume Lacoste, Histoire générale de la province de Quercy, publiée par Combarieu et Cangardel. Voir ci-dessus, sous la lettre D.

Indiqué : Le Cointe, Annales ecclesiastici Francorum, t. VII, p. 533, n° xxvii, ann. 820, d'après E.

Indiqué : Gallia christiana, t. I, col. 123, art. Angarius, d'après E et Le Cointe.

Le diplôme que nous font connaître les quatre analyses que nous venons de signaler a paru suspect à M. Bruno Krusch ; mais c'est certainement sans raisons sérieuses.

Nous observons que nos informateurs ont puisé à des sources différentes : que G. de La Croix et l'anonyme B ont eu entre les mains une très ancienne copie conservée dans les archives de l'abbaye de Figeac, tandis que Foulhiac et Lacoste ont connu le diplôme par un cartulaire de Conques. Et cela est très important pour la question de l'authenticité.

On sait, en effet, que les deux abbayes de Conques et de Figeac eurent au xie s. une longue rivalité : les moines de Figeac, dont la maison avait été fondée au ixe s. par des moines de Conques, s'étaient rendus indépendants ; non seulement ils voulurent éviter de retomber sous le joug de l'abbé de Conques, mais encore ils prétendirent mettre dans leur dépendance l'abbaye rivale en affirmant que leur monastère était plus ancien que celui des Conquois et avait été la maison-mère, Conques n'étant plus ainsi qu'un simple prieuré. Pour soutenir leur thèse, ils forgèrent des documents ; et, à cette fin, ils se procurèrent des copies des documents que leurs adversaires gardaient dans leur chartrier : témoin ce diplôme de Pépin Ier d'Aquitaine en faveur de Conques qui servit de modèle à un faussaire figeacien pour fabriquer un faux diplôme de Pépin le Bref. C'est alors qu'à Figeac on dut entrer en possession de cette « pervetus scheda » dont parle G. de La Croix. La parfaite similitude des analyses de la teneur, que cette teneur ait été lue dans la copie figeacienne ou dans la transcription du Cartulaire de Conques, est une première garantie que l'acte n'avait point été forgé pour servir la cause de l'une ou de l'autre abbaye.

Et, du reste, que dit-elle, cette teneur ? Que Pépin Ier a échangé des biens avec l'évêque de Cahors. Le diplôme n'assure donc pas la propriété de la « cella » de « Jonant » à l'une des deux maisons rivales : c'est un titre de propriété qui était entré dans les archives de celle-là des deux abbayes qui avait réellement reçu en don du roi Pépin Ier le petit prieuré avec ses dépendances.

Les données chronologiques et la mention topographique de la date plaident encore en faveur de l'authenticité du document. Il faut ici écarter le témoignage de Lacoste : il dit expressément qu'il a pris ses renseignements dans le Cartulaire de Conques, et il a vu que l'acte était daté de la 6e année et de Spire. Il a, sans doute, par inadvertance, appliqué au diplôme de Pépin la date d'une charte voisine, ou il a péché par distraction : car, Foulhiac, s'étant servi de la même source, a lu tout autre chose, et sa lecture est confirmée, pour les dates de règne et d'empire comme pour le quantième, par le témoignage de ceux qui ont vu la copie de Figeac.

En utilisant les trois sources qui nous restent, nous pouvons à coup sûr restituer la formule de la date du diplôme perdu : Data IV kal. junii, anno VI imperii domni Ludovici [serenissimi augusti] et VII regni nostri. [Actum] in Neomago palatio. [In Dei nomine, feliciter. Amen.]

Nous avons dans cette restitution conservé les chiffres donnés par G. de La Croix et Foulhiac pour les années de l'empire et pour celles du règne en Aquitaine. Mais il est évident qu'ils sont à reviser. Le Cointe, le premier, s'est rendu compte de cette nécessité ; il a bien vu que Louis le Pieux ne pouvait pas être dans sa sixième année d'empire si Pépin était dans sa septième année de règne ; et il a proposé ou bien de conserver l'année de l'empire et de substituer V à VII, ou mieux de croire à une permutation de chiffres, de donner sept années d'empire à Louis le Pieux et six années de règne à Pépin. On se demande en vérité pourquoi il n'a pas fait une dernière hypothèse, qui se trouve être la plus vraisemblable et bientôt la seule vraie : considérer VII regni nostri comme le texte intangible et proposer de corriger VI en VIII. Le fait que nos trois sources nous donnent la même leçon prouve que les copies de Figeac et de Conques dérivaient d'un même modèle qui pouvait être ou une copie ou l'original, et VI peut alors s'expliquer soit par une étourderie du premier copiste, soit par le mauvais état de l'original : un trou, un pli du parchemin, l'encre qui blanchit et s'efface, peuvent fournir une explication plausible. Enfin voici qui est décisif et ce que Le Cointe ne pouvait pas savoir, puisque Guillaume de La Croix ne lui fournissait pas le nom de lieu : le séjour à Nimègue n'est possible qu'avec la huitième année d'empire et la septième année du règne de Pépin qui correspondent à l'an de l'incarnation 821. Ni en 819 ni en 820, la cour impériale n'a séjourné à Nimègue ; au contraire, en 821, et précisément au mois de mai, le palais impérial est fixé dans cette ville : l'empereur Louis le Pieux y a convoqué une assemblée pour le mois de mai ; dans cette assemblée qui fut tenue le 1er mai, il confirma le partage de son empire qu'il avait fait entre ses fils en 817 ; et il ne partit de Nimègue qu'après le 3 juin. Notre diplôme nous prouve que Pépin Ier, après avoir assisté au plaid de mai où l'on avait agité une question qui ne pouvait le laisser indifférent, avait prolongé son séjour à la cour au moins jusqu'à la fin du mois.

Il faut donc lire la date ainsi : Data IV kal. junii, anno VI [II] imperii domni Ludovici [serenissimi augusti] et VII regni nostri. [Actum] in Neomago palatio. [In Dei nomine, feliciter. Amen].

Il n'y a aucune raison de douter de l'authenticité du diplôme perdu.


« 820. Mention d'un échange entre Pépin Ier, roi d'Aquitaine, et Angarius évêque de Cahors.

Échange important entre Pépin Ier roi d'Aquitaine et Angarius évêque de Cahors. Ce premier céda au prélat et à son chapitre plusieurs villages transportés jadis à l'empereur son père par le comte Autricus, savoir celui de Cassemogilo en Rouergue, et les autres, dont l'un nommé Bulliensis, en Quercy. Il reçoit en retour la celle ou petit monastère de Jonant, bâtie en l'honneur de St Martin, avec ses églises, ses maisons, ses villages et généralement toutes ses autres appartenances. Cet échange se fit du consentement des religieux de Jonant au palais royal de Nimègue, le 28 mai ( ). » B.

« Il est fait mention d'Angarius, évêque de Cahors, dans le cartulaire de Conques, où il est dit que cet évêque fit un échange avec Pépin roi de Guyenne, à qui il donna l'église ou chapelle de Saint-Martin de Lunan, et il prit en échange les terres qu'Autricus, comte de Caors, avoit données à Pépin. Cet acte est daté de l'an 6e de l'empire de Louis et le 7e de Pépin, in Neomago palatio. » C.

« Ce prince (Pépin Ier) s'occupa, dès la sixième année de son règne, du rétablissement de l'abbaye de Figeac. On trouve dans le cartulaire de l'abbaye de Conques en Rouergue, un acte de la même année, daté du palais de Spire et qui peut servir à en fixer l'époque ; c'est la concession de l'oratoire de Saint Martin de Junant de Figeac, faite par l'évêque Angarn et l'église de Cahors au roi Pépin qui, de son côté, cède à l'évêque et à son église certains fonds de terre situés dans le Quercy et le Rouergue, que son père, Louis le Débonnaire, avait autrefois acquis du comte Austricus. » D.

« Angarius Aymatum proxime sequitur : fidem facit pervetus scheda abbatiae Figiacensis eum hac seculi noni periodo sedi Cadurcensi affixum : ea quippe habetur permutatio cellulae Lonante divo Martino sacrȩ et in qua prima ipsius abbatiȩ jacta fuerant fundamenta, cum vicis aliquot in pagis Ruthenico et Cadurcino sitis inita Angarium inter Cadurcensem episcopum et Pipinum Ludovici imperatoris filium Aquitaniae regem, cujus hȩc est subnotatio, Datum IV kal. junii, anno VI imperii domini Ludovici, et VII regni nostri. Hic vero est annus Chr. 819, quod Ludovicus ex Thegano et Sigeberto anno Chr. 814 imperare coeperit. » E.


Localisation de l'acte

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