881, 5 juin. — Pouilly[-sur-Loire].

Carloman, à la demande de l'abbé Raoul (Rodolfus), donne au monastère de Saint-Florent, en raison des dévastations commises par les Normands, la « cella » de Saint-Gondon-sur-Loire (Nobiliacus) en Berry pour servir de refuge et y abriter le corps de saint Florent. Il accorde en outre aux moines la circulation en franchise de quatre bateaux sur tous les cours d'eau du royaume, le privilège de l'immunité sanctionné par l'amende de six cents sous contre les infracteurs, la liberté des élections abbatiales et le libre choix de leur avoué à qui remise est faite du « tortum ».

Référence : Félix Grat, Jacques de Font-Réaulx, Georges Tessier et Robert-Henri Bautier (éd.), Recueil des Actes de Louis II le Bègue, Louis III et Carloman II, rois de France (877-884), Paris, 1978, no55.

A. Original perdu.

B. Copie figurée du xie s., dans le Rouleau des privilèges de Saint-Florent, pièce n° 2, Archives de Maine-et-Loire, H 1836.

C. Copie du xiie s., dans le Livre d'argent de Saint-Florent, Archives de Maine-et-Loire, H 3714, fol. 28, sous le titre : « Item unde supra de eadem re Karlomagni regis », d'après le Livre noir de Saint-Florent.

D. Autre copie incomplète, du xiie s., dans le même Livre d'argent, fol. 55 v°, d'après C.

E. Copie du xiiie s., dans le Livre rouge de Saint-Florent, Archives de Maine-et-Loire, H 3725, fol. 19 v°, d'après C.

F. Copie du 12 novembre 1376, sous le sceau de l'abbé, Archives de Maine-et-Loire, H 3299, n° 3, « extractum a libro vocato las cononicas dicti monasterii prout sequitur, facta collatione cum originali contento in dicto libro canonicarum », d'après E.

G. Copie du xve s., dans un cartulaire en papier, Bibliothèque nationale, ms. lat., nouv. acq. 1931, fol. 3 v°, d'après E.

H. Copie du xviie s., par André Du Chesne, Bibliothèque de Dijon, ms. 916, fol. 70, d'après E.

I. Copie du xviie s., Bibliothèque nationale, ms. lat. 13817, fol. 314, d'après E.

J. Copie du xviiie s., Bibliothèque nationale, Collection de Touraine, vol. 1, fol. 132, d'après C.

K. Extrait du xviie s., par Laisné, Bibliothèque nationale, ms. franç. 24133, fol. 519, d'après C.

L. Extrait du xviie s., par Dom Huynes, dans l'Histoire de Saint-Florent de Saumur, Bibliothèque nationale, ms. franç. 19862, fol. 31 v°, d'après E.

M. Extrait du xviie s., par Dom Huynes, Archives de Maine-et-Loire, H 3716, fol. 16 v°, d'après E.

N. Extrait du xviiie s., Bibliothèque d'Angers, ms. 857, fol. 54, d'après L.

a. Dom Lobineau, Histoire de Bretagne, t. II, col. 52, d'après E.

b. Dom Morice, Mémoires pour servir de preuves à l'histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, t. I, col. 277, d'après B.

c. Recueil des historiens de la France, t. IX, p. 422, n° VI (extrait), d'après C.

d. P. Marchegay, Cartulaire de Saint-Gondon-sur-Loire, p. 12, n° I, d'après BCDE.

e. M. Saché, Inventaire sommaire des Archives départementales de Maine-et-Loire, série H, t. II, p. 4, d'après B.

Indiqué : Bréquigny, Table chronologique, t. I, p. 327.

Indiqué : Böhmer, Regesta, n° 1854.

Indiqué : F. Lot, Mélanges d'histoire bretonne, p. 55, n. 2.

Indiqué : Grat, Catalogue, n° 44.

Le diplôme dont on lira ci-dessous le texte a été déclaré faux par M. Saché (édition signalée sous la lettre e). La convenance du protocole initial et du protocole final ainsi que l'existence d'un précepte expédié la veille dans la même localité (n° 54) en faveur d'une autre église, celle de Narbonne, nous autorisent à appeler de ce jugement. Dans sa première partie, le précepte de Carloman reproduit servilement les termes d'un diplôme de Charles le Chauve en date du 16 janvier 866 et portant donation de la cella de Saint-Gondon (Recueil, t. II, p. 132, n° 287). Seul, le nom de l'abbé Haecfridus a été remplacé par celui de Rodulfus. Carloman ne fait donc que confirmer, sans le dire, la libéralité consentie par son grand-père. Certes l'exposé de l'un et de l'autre diplôme ne répond pas au style habituel de la chancellerie et on comprend, sur ce point, les doutes exprimés par M. Saché ; mais il n'est pas impossible que le texte ait été rédigé par un moine de Saint-Florent ; il pourrait tout aussi bien l'avoir été par un notaire de la chancellerie écrivant sous le coup de la campagne dévastatrice que menèrent les Normands en 865 et que marqua notamment l'incendie d'Orléans. Au début de son règne, Charles le Chauve avait confirmé le privilège d'immunité dont jouissait Saint-Florent. Le précepte confirmatif étant perdu (Recueil, t. II, p. 518, n° 93bis), nous ne pouvons déterminer dans quelle mesure le diplôme de Carloman en reproduisait les dispositions, mais il ne devait pas innover. Initialement, en effet, l'immunité avait été accordée à Saint-Florent par Louis le Pieux le 30 juin 824 (Böhmer-Mühlbacher, Die Regesten, n° 786) ; le précepte impérial, d'une forme très régulière, contient les clauses d'abandon des droits fiscaux et de liberté des élections abbatiales, mais l'amende de 600 sous n'y est pas stipulée et il n'y est pas question du choix de l'avoué. Pépin Ier d'Aquitaine avait confirmé les dispositions paternelles par un précepte aujourd'hui perdu (L. Levillain, Recueil des actes de Pépin Ier et de Pépin II, rois d'Aquitaine, p. 169, n° XL). On possède enfin un précepte original de Pépin II, confirmant ceux de son grand-père Louis le Pieux, de son père, Pépin Ier, et de son oncle Charles le Chauve (Levillain, p. 202, n° LIII) ; le diplôme, daté du 27 mai 847, est anormalement rédigé ; la circulation en franchise des bateaux du monastère, sans limitation de nombre, y est autorisée et une clause spéciale concerne les avoués. Mais on peut être assuré qu'il n'existe aucune dépendance textuelle du diplôme de Carloman vis-à-vis de celui de Pépin II, et il est très vraisemblable que dans sa seconde partie le texte ci-dessous est l'écho de celui du précepte perdu de Charles le Chauve.

Le chiffre de l'indiction est erroné et doit être forcé d'une unité.


Texte établi d'après B et C. Orthographe de B

In nomine Domini Dei aeterni et Salvatoris nostri Jhesu Christi. Karlomannus gratia Dei rex. Quicquid pro utilitate ac necessitate servorum Dei facere contendimus, profuturum nobis ad aeternam beatitudinem facilius obtinendam et presentem vitam felicius transigendam procul dubio confidimus. Itaque noverit omnium sanctę Dei Ecclesię fidelium nostrorumque, tam presentium quam et futurorum, sollercia quia venerabilis vir et religiosus abbas Rodulfus monasterii beati Florentii una cum monachis inibi Deo militantibus ad nostram accedens sublimitatem, miserabile auditu, lacrimabili suggestione exposuit mansuetudini nostrę calamitatem prefati monasterii ceteramque miseriam ipsius regionis pro peccatis nostris ab inimicis Dei cruentissimis Normannis crudeliter sepius illatam, ita ut eadem provincia quondam visu pulcherrima in solitudinis faciem penitus videatur esse redacta. Quare, sicut et aliis incolis quondam illius plagę, multo magis quoque monachis sepius dicti monasterii ejusdem religiosi viri abbatis cura providendis, in eodem loco exclusa est habitatio. Igitur oravit suppliciter idem venerandus abbas Rodulfus ut ad suorum refugium monachorum et ad receptionem sacratissimi corporis beati Florentii concedere sibi dignaremur cellam secus fluvium Ligerim, in pago Biturico sitam, quę dicitur Nobiliacus, quemadmodum predecessori illius Didoni quondam abbati nos fecisse cognoscitur, in qua cella sanctus Gundulfus reverenter colitur humatus, quatinus a manibus suprascriptorum inimicorum Dei se evasisse exultantes, requiem ibidem de tanta persecutione tandem mereantur Christo propicio invenire et in laude divinę misericordię valeant respirare. Nos autem, supplicibus ejusdem Rodulfi abbatis monachorumque ejus precibus benignum assensum prebentes, altitudinis nostrę preceptum hoc fieri jussimus, per quod memoratam sancti Gundulfi cellam cum familia utriusque sexus et rerum omnium aliarum plenitudine sepedicto venerando abbati Rodulfo suisque habendum concedimus atque largimur, videlicet ut, pro nomine Domini et peccatorum nostrorum ablutione, monasterium illud cum omnibus sibi pertinentibus rebus ab eodem Rodulfo reverendo abbate successoribusque ejus secundum regularis institutionis ordinem omnimodis agatur et sine cujuspiam contradictionis inquietudine regulariter disponatur ad utilitatem ac necessitatem servorum Dei nostris futurisque temporibus secundum sacrę institutionis normam sancti Benedicti ibidem Domino servientium atque famulantium. Concedimus quoque supradicto monasterio quatuor naves in omnibus aquis quę in regno nostro decurrunt et licentiam navigandi sine ullo inpedimento, ut nullus ministerialis ripaticum nec teloneum accipiat nec predictum coenobium pro eis ullo modo pretium persolvat. Volumusque denique et per nostrę auctoritatis preceptum decernimus atque jubemus ut nullus judex publicus vel quislibet ex juditiaria potestate in ecclesias vel ad loca vel agros seu reliquas possessiones memorati monasterii quas moderno tempore infra dictionem regni nostri juste vel rationabiliter possidet vel quę deinceps in jure ipsius monasterii voluerit divina pietas augere, ad causas audiendas vel freda aut tributa exigenda, aut mansiones aut paratas faciendas, vel fidejussores tollendos aut homines ejusdem monasterii tam ingenuos quam servos super terram ipsius commanentes distringendos, nec ullas redibitiones requirendas, nostris et futuris temporibus ingredi audeat vel ea quę superius memorata sunt penitus exigere presumat, sed liceat memorato abbati suisque successoribus res predicti monasterii sub emunitatis nostrę defensione quieto ordine possidere. Placuit namque nostrę celsitudini, regia decernente auctoritate, qualiter constitueremus prefato loco privilegium per preceptum nostrę auctoritatis, si quid infringere de supradictis quispiam visus fuerit unquam, sexcentorum solidorum inmunitatem rectoribus ejusdem loci exsolvere cogatur. Et quicquid exinde fiscus noster sperare poterat, totum nos pro aeterna remuneratione prefato monasterio concedimus, ut in alimonia pauperum et stipendia monachorum ibidem Deo famulantium proficiat perhennibus temporibus in augmentum. Et quandoquidem divina vocatione supradictus abba vel ceteri subsequentes de hac luce migraverint, ipsi monachi ibidem Deo famulantes per nostram permissionem et consensum juxta ordinem et regulam beati Benedicti ex sese licenciam eligendi habeant semper abbatem, quatinus servos Dei, qui ibidem Deo famulantur, pro avo, patre, pro nobis nostrique generis prosapie atque stabilitate totius regni nostri a Deo nobis collati atque conservandi jugiter Dominum exorare delectet. Advocatum quemque recte elegerint habeant et ob renumerationem nostri tortum ei omne dimittimus. Ut autem nostrę munificentie auctoritas firmior habeatur et per futura tempora diligentius conservetur, manu propria subter eam firmavimus et anulo nostro insigniri jussimus.

Signum (Monogramma) Karlomanni gloriosissimi regis.

(Chrismon) Norbertus notarius ad vicem Vulfardi recognovit et [subscripsit].

Datum non. junii, anno tercio regni Karlomanni gloriosissimi regis, indictione XIII. Actum apud Pauliacum vicum. Feliciter. Amen (notae : Amen. Amen).

Hugo venerabilis abba hoc ambasciavit.


Localisation de l'acte

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