850, 27 mai. — Verberie.

Charles le Chauve, à la prière d'Oacre (Audacher), abbé de Cormery, et avec le consentement de Vivien, recteur de Saint-Martin [de Tours], monastère auquel étaient subordonnés le dit abbé et sa communauté, autorise Oacre à recevoir de Ménard (Mainardus), homme illustre, des biens sis en Touraine, sur l'Indroye, à Villeloin, pour y fonder une «cella» en l'honneur du Sauveur, accorde au nouvel établissement, placé sous l'autorité d'Oacre, le bénéfice de l'immunité, le garantit contre toute ingérence étrangère, stipule qu'Oacre pourra disposer des biens de la «cella» pour le service de Dieu, que ses décisions devront être respectées, mais que cependant les moines devront après sa mort obéir à l'abbé régulièrement élu, à moins de disposition contraire, qu'enfin Oacre et ses successeurs pourront confier la défense des intérêts de la «cella» à un avoué de leur choix.

Référence : Arthur Giry, Maurice Prou, Georges Tessier et Ferdinand Lot (éd.), Recueil des actes de Charles II le Chauve, roi de France (840-860), Vol. 1, Paris, 1943, no131.

A. Original perdu.

B. Copie du xive s., dans la transcription d'un vidimus de Charles VI, donné à Tours en novembre 1391, confirmant un vidimus de Philippe le Bel, donné à Loches en août 1301, Archives nationales, JJ 141, fol. 162, n° cciiiixxi, sous le titre: «Confirmacio quorundam privilegiorum religiosis Cormaricensibus facta», d'après l'original du vidimus.

C. Copie de l'année 1629, par F. Pierre Brunet, prieur claustral de Villeloin, dans des Mémoires concernant la fondation... de l'abbaye Sainct-Saulveur de Villeloing, reliés en tête d'un cartulaire de Villeloin, du xiiie s., fol. i, Archives du Cogner (collection Jules Chappée), d'après un cartulaire, avec référence à A.

D. Copie de la fin du xviie s., par Gaignières, Bibliothèque nationale, ms. lat. 17129 (anc. Gaignières 678), p. 1, sous le titre: «Praeceptum Caroli Calvi, regis Francorum, de Villalupe coenobio quod juris abbatis et Benedictinorum Cormaricenorum esse voluit, ut Mainardus fundator esse decreverat et optaverat», d'après un cartulaire de Villeloin, avec référence à A (layette cotée +).

E. Copie du xviiie s., par Dom Housseau, Bibliothèque nationale, Collection de Touraine, vol. 1, fol. 86, n° 71, sous le titre: «Carta fundationis abbatiae Villae Lupensis per Carolum Calvum», «ex cartulario Villae Lupensis», d'après le même cartulaire que C et D.

F. Copie du xviiie s., Bibliothèque nationale, Collection Bréquigny, vol. 46, fol. 79, «ex cartulario Villae Lupensis», d'après le même cartulaire que CD et E.

G. Copie de l'année 1551, dans l'Historia Sancti Pauli Cormaricensis de Joachim Périon, Bibliothèque de Tours, ms. 1349, fol. xviii, sous le même titre qu'en D, d'après le même cartulaire que CDEF.

H. Copie du xviie s., par André Du Chesne, vol. 4, fol. 180, sous le même titre qu'en D et G, «ex cartulario Cormaricensi», d'après G, mais avec des corrections.

I. Copie du xviie s., par André Du Chesne, Bibliothèque nationale, Collection Baluze, vol. 54, fol. 501, d'après B.

J. Copie partielle, du xviiie s., par Dom Housseau, dans la transcription d'un vidimus de Louis IX, donné à Tours en octobre 1255, Bibliothèque nationale, Collection de Touraine, vol. 7, fol. 178, n° 3057, d'après un cartulaire de Villeloin, fol. 20, avec référence à l'original du vidimus scellé sur cire verte et lacs «de fillozelle rouge».

K. Extraits de l'année 1666, par Dom Yves Gaigneron, Historia Cormaricensis, Bibliothèque nationale, ms. lat. 13901, p. 28, d'après G.

a. Sainte-Marthe, Gallia christiana, t. IV, p. 938, «ex donationis documento quod, ab ipso originali exscriptum, in coenobii scriniis est hujusmodi», d'après une copie de A.

b. Recueil des historiens de la France, t. VIII, p. 511, n° xcviii, d'après a.

c. Dufour, Dictionnaire de l'arrondissement de Loches, t. II, p. 445, d'après a.

d. Gallia christiana, t. XIV, instrumenta, col. 35, n° xxviii, «ex autographo Benedictini», d'après a, avec des corrections et des compléments.

e. J.-J. Bourassé, Cartulaire de Cormery, dans les Mémoires de la Société archéologique de Touraine, t. XII (1861), p. 34, n° xvii, d'après G.

f. L.-J. Denis, Archives du Cogner, série H. Cartulaire de l'Abbaye de Saint-Sauveur de Villeloin p. 2, d'après C.

Indiqué : Bréquigny, Table chronologique, t. I, p. 231.

Indiqué : Böhmer, Regesta, n° 1622.

On ne saurait utiliser ce diplôme qu'avec précaution. Les irrégularités du formulaire le rendent suspect. Le préambule est alourdi de considérations insolites. Dans la formule d'immunité, la clause «ad causas audiendas» est anormalement remplacée par les mots «ad decimas percipiendas». La renonciation aux droits fiscaux n'est pas introduite de la façon habituelle. La partie du dispositif commençant par les mots: «Et quoniam multa sunt...» et accordant aux moines de Villeloin la liberté des élections abbatiales, sous réserve d'une disposition contraire de l'abbé Oacre, est obscure. L'autonomie éventuelle qu'elle suggère ne s'accorde pas entièrement avec les termes beaucoup plus clairs de la charte de l'archevêque Érard du 19 mai 859, concernant le statut de l'établissement (Bourassé, ouvr. cité, p. 44, n° xxi). Le prélat, après avoir édicté l'union intime de Villeloin et de Cormery sous le gouvernement d'un seul abbé «ita ut, sicut unus pastor et pater, unus fiat grex unumque existat ovile», stipule cependant que, si la vie régulière venait à disparaître à Cormery, le monastère de Villeloin devrait subsister en pleine indépendance et que les moines du dit lieu pourraient alors «patrem praestituere», c'est-à-dire, semble-t-il, mettre à leur tête un abbé de leur choix. On a l'impression que le diplôme de Charles le Chauve a été remanié pour permettre à Villeloin de revendiquer son indépendance à l'égard de Cormery. S'il en est ainsi, l'original auquel se réfèrent plusieurs copies et l'édition a n'aurait été qu'un pseudo-original. Toutefois, il est à peu près certain qu'un diplôme a été réellement délivré à la date indiquée à l'abbé Oacre, l'autorisant à recevoir le lieu de Villeloin pour y construire un monastère, lui garantissant, sa vie durant, le gouvernement de celui-ci et accordant au nouvel établissement le bénéfice de l'immunité. Ces dispositions sont vraisemblables; elles s'accordent avec la mention d'un «regalis... praeceptum tuitionis et defensionis», insérée dans la charte d'Érard citée plus haut. D'autre part, la présence de Charles le Chauve à Verberie, dont la forme régulière est aisément reconnaissable sous la graphie fautive Vermerac ou Vermerach, en mai 850, est certaine et le notaire Gislebertus était alors en pleine activité. On admettra donc que nous sommes en présence d'un diplôme remanié et interpolé.

Texte établi d'après les copies B à H et d'après a. Sauf indication contraire, nous suivons l'orthographe de C.

In nomine sanctae et individuae Trinitatis. Karolus gratia Dei rex. Quandocumque servorum Dei nostrorumque fidelium justis petitionibus, maxime quidem in his rebus quae ad gloriam summi regis Domini nostri Jesu Christi et ad augmentum vel exaltationem apostolici ordinis primitivae Ecclesiae, aurem celsitudinis nostrae annuentes accommodamus, regiae majestatis consuetudini operam damus hocque precipue ad emolumentum animae nostrae praesentisque et futuri regni gloriam naviter capessendam procul dubio pertinere confidimus. Ideoque notum esse volumus omnibus episcopis, ducibus et comitibus, abbatibus, vicecomitibus, vicariis, centenariis et quibuslibet rei publicae in omni regno nostro curam administrantibus seu gubernantibus una cum universis sanctae Dei Ecclesiae fidelibus et nostris, praesentibus atque futuris, qualiter venerabilis Audacher, abba Cormaricensis coenobii, adierit serenitatem culminis nostri, indicans quendam illustrem virum, nomine Mainardum, sibi per petitionis scriptum secundum legis ordinem patratum, suppliciter postulasse ut in rebus suae proprietatis, in pago videlicet Turonico, super fluvium cui nomen est Andrisco, in loco qui rustico vocabulo Villalupae vocatur, easdem res vice Christi suscipiens, cellam sub norma inibi degentium monachorum juxta loci qualitatem fundari, construi in honorem Salvatoris nostri Jesu Christi ac pro viribus adornari ob ipsius Dei omnipotentis amorem suorumque sanctorum venerationem omnimodis decertaret. Et quoniam constat eundem venerabilem abbatem jam dictum sub potestate et tuitione eximii et preciosi confessoris domni Martini, una cum sibimet congregatione commissa, degere, junxit secum illustris viri et fidelis nostri Viviani, rectoris monasterii ipsius sancti confessoris, consensum et suggessit celsitudini nostrae humiliter postulans ut easdem res sibi suscipere nostra auctoritate liceret ad Dei omnipotentis obsequium ibidem perpetuo celebrandum servorumque ejus pro vita regum statuque sanctae Dei Ecclesiae deprecantium tutum nostrae defensionis munimine refugium habendum. Cujus petitionibus aurem nostrae celsitudinis inclinantes assensum favore maximo praebuimus, quin etiam, tam pii laboris studio delectati, nostrae adhortationis, ut in opere liberius decertaret, piaeque concessionis adjunximus fomitem ac proinde hoc nostrae serenitatis praeceptum juxta deprecationem ejus fieri jussimus et, propter quietem quae monachis est convenientissima, placuit ut memoratum locellum una cum rebus omnibus ad ipsum locum aspicientibus, more regio, nostrae emunitatis defensione sub jure et dispositione suprafati abbatis Audachri eorumque quos ibidem constituerit monachorum in perpetuum confirmaremus. Praecipientes ergo jubemus atque jubendo praecipimus ut nullus judex publicus nec quilibet ex judiciaria potestate nec aliquis ex fidelibus sanctae Dei Ecclesiae ac nostris in ecclesias aut loca vel agros seu reliquas possessiones praedicti monasterii quas presenti tempore possidet aut quas ibi divina pietas accommodaverit, in quibuslibet pagis et territoriis, [ad] <decimas accipiendas> vel freda exigenda aut tributa, seu mansiones vel paratas faciendas, sive fidejussores tollendos hominesve ipsius monasterii tam ingenuos quam et servos supra terram ipsius commorantes distringendos, aut ullas redibitiones vel illicitas occasiones requirendas, ullo unquam tempore ingredi audeat vel exactare praesumat, quoniam quicquid fiscus exigere poterat, pro animae nostrae remedio, concedimus. Sancimus denique et omnimodis statuimus ut idem suprafatus abba nobis carissimus et monachi sui successoresque eorum nullius unquam pro rebus ipsius monasterii habitis vel habendis terrenae potestatis jugo inviti subjaceant, sed ad solius Dei servitium praedictus Audacher abba in eodem loco de rebus omnibus ad ipsum pertinentibus jus liberum et dispositionem nostra concessione cum Dei voluntate omni obtineat tempore vitae. Et quoniam multa sunt quae in presenti puro nequaquam conspecta intuitu in futuro certius praevidentur, ordinamus et nostra benevolentia concedimus ut quicquid saepe fatus abba cum voluntate Dei et servorum ejus de eodem loco tractans utiliter constituerit, hoc est ad cujuscunque potestatis constitutionem, post suum discessum abbatem secundum regulam sancti Benedicti electum monachi ejusdem loci aliquatenus subditi accipere debeant vel, si quid aliter utilius cum voluntate Dei et auctoritate regulari definiens statuerit, ratum atque inviolabile super eundem locum permaneat; pro infestationibus vero pessimorum iniquorumque hominum quemcunque sepe memoratus Audacher abba aut successores ejus voluerint eligere advocatum vel causidicum ad res ipsius monasterii inquirendas seu defendendas, liberam in omnibus habeant facultatem, ita ut omnes comites vel cujuslibet administrationis judices sive Dei omnipotentis nostrique fideles, ad quorumcunque placitum vel ante quorumcunque judicium ipsius coenobii advocatus venerit, pro Dei amore et nostra jussione, in cunctis justis ratiociniis solatium ei atque adjutorium praebeant talemque potestatem atque auctoritatem ad res easdem inquirendas sive defendendas habeant qualem decet in rebus omnipotenti Domino oblatis atque consecratis. Et ut haec auctoritas nostris futurisque temporibus, Domino protegente, valeat inviolata permanere, manu nostra eam subter firmavimus et de anulo nostro sigillari jussimus.

Signum (Monogramma) Karoli gloriosissimi regis.

Gislebertus notarius ad vicem Hludovici recognovit. (Locus sigilli).

Data VI kal. junii, anno X, indictione XIII, regnante Karolo gloriosissimo rege. Actum Vermerach palatio regio. In Dei nomine feliciter. Amen.


Localisation de l'acte

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