843, 8 mars. — Vernantes (?).
Charles le Chauve, ayant révoqué deux donations, l'une de la «cellula» de Boissy, dans le Maine, faite par son père, l'autre de Pontpoint, de [Pont-]Sainte-Maxence et des redevances perçues tant au profit du fisc que du comté sur le pont de cette localité, faite antérieurement par lui au monastère que Louis le Pieux avait établi au lieu dit «Curbionis» auprès du tombeau de saint Lomer sous la direction de l'abbé Heriricus, lui donne en échange la «cellula» d'Ilou sur l'Avre, dans le Dreugesin, met tous les biens du monastère sous la protection royale et celle de l'immunité, conformément aux décisions antérieures de Louis le Pieux et aux siennes propres, le dispense de toute prestation à titre de don ainsi que de l'ost et des services publics et stipule que les moines pourront s'adresser au roi pour leur faire justice, si, leurs titres étant perdus, leurs droits venaient à être contestés.
A. Original perdu.
B. Copie d'octobre 1381 dans la transcription d'un vidimus original, perdu, de Charles VI, donné à Compiègne en septembre 1381, Archives nationales, JJ 119, fol. 217, n° CCCLXVIII, sous le titre: «Confirmacio donacionis cujusdam domus abbati et fratribus Turbionis (Corrigez Curbionis) facta».
C. Copie informe du xviie s., de 1646 au plus tard, dans la transcription d'un vidimus donné le 13 février 1416 (n. st.), sous le sceau des obligations de la vicomté de Nonancourt du vidimus original de Charles VI signalé sous la lettre B, Archives de Loir-et-Cher, G 2647.
D. Copie de l'année 1646, par Dom Noël Mars, dans l'Histoire du royal monastère de S. Lomer de Blois, Bibliothèque de la ville de Blois, ms. 52, fol. 108, d'après C.
a. Acta sanctorum ordinis sancti Benedicti, saeculum quartum, pars 2a (t. VI), p. 253, d'après une copie du vidimus de Charles VI transcrite dans un registre de la Chambre des comptes (court extrait).
b. Gallia christiana, t. VIII, Instrumenta, col. 411, n° 1 «ex chart. S. Launomari» (année 842).
c. Recueil des historiens de la France, t. VIII, p. 433, n° viii, d'après b corrigé à l'aide du registre de la Chambre des comptes signalé sous la lettre a (année 842).
d. Dom Noël Mars, Histoire du royal monastère de S. Lomer de Blois, édition A. Dupré, p. 365, d'après D.
Indiqué : Bréquigny, Table chronologique, t. I, p. 206.
Indiqué : Lot et Halphen, Le règne de Charles le Chauve, p. 62, n. 1.
L'acte tel qu'il se présente dans sa teneur actuelle est au plus haut point suspect et ne saurait être utilisé par les historiens qu'avec une extrême prudence. Il contient des clauses insolites. Les formules sont souvent incorrectes, à commencer par la notification adressée aux successeurs du roi. La tradition est mauvaise. Elle se rattache tout entière, y compris, semble-t-il, l'édition de la Gallia (b) au vidimus original de Charles VI, signalé en B, lui-même perdu. Ni la souscription du roi, ni celle du notaire n'y étaient reproduites. Elles devaient manquer sur le pseudo-original présenté à la chancellerie. Pourtant, si le diplôme était daté de Vernantes, en Anjou, il y aurait une coïncidence troublante avec l'itinéraire du roi. C'est de Vernantes que la chancellerie avait expédié le diplôme du 18 février précédent (n° 19). Charles le Chauve, il est vrai, arrivé à Tours le 23 février, avait pénétré en Aquitaine et pour expliquer que le diplôme du 8 mars fût encore daté de Vernantes, F. Lot et L. Halphen ont dû supposer une discordance entre le Datum et l'Actum. Mais est-ce bien Vernantes qu'il faut lire? Dom Bouquet (c), qui imprime Vernemptas, corrigeait arbitrairement les textes. Si la Gallia (b) porte Vernemptae, en suggérant la correction Vermeriaci, Mabillon (a) a lu Verumpaci, qu'il propose lui aussi de corriger en Vermeriaci, et les deux copies manuscrites B et C, indépendantes l'une de l'autre, portent Verumpas. Rien ne peut nous donner une solution, sauf la découverte du vidimus original. La coïncidence de la date et de l'itinéraire du roi n'est donc pas assurée. Nous croyons cependant qu'il y a eu à la base du texte actuel, victime de remaniements et d'interpolations, un diplôme réellement expédié. Quelques formules sont correctes, par exemple celle de l'abandon du produit des droits fiscaux. On se demande surtout à quoi bon inventer une révocation de biens pour justifier la propriété de la «cellula» d'Ilou. — On ne connaît pas de diplôme de Louis le Pieux pour Saint-Lomer. — L'année du règne et l'indiction ne concordent pas. Nous devrions avoir la sixième indiction.
Texte établi d'après BCab et c.
In nomine sancte et individue Trinitatis. Karolus gratia Dei rex. Si in oportuna et competenti rerum ecclesiasticarum dispensacione aliqua regali sollicitudine prospicimus, procul dubio Deum quem fautorem habemus credimus nos habere remuneratorem. Notum sit ergo omnibus fidelibus sancte Dei Ecclesie et nostris, presentibus scilicet et futuris, atque, Deo dispensante, successoribus nostris quia pie memorie genitor noster serenissimus augustus Heriricum venerabilem abbatem et cetum fratrum sibi commissorum transtulit in locum quem nunc inhabitant, Curbionis vocabulo, ubi beatus confessor Launomarus debito frequentatur honore, quos, ut ab omni strepitu mundano tuti inexcusabiliter Deo militare possent, plurimo beneficio juvit, regali munificencia contradens quandam cellulam in pago Cenomanico que dicitur Buxiacus. Cujus ferventissimum amorem, dum adviveret, erga predictos Christi milites nos ipsi quoque prospicientes, eo eciam nobis sepe illos commendante, placuit piam ejus imitari memoriam atque ad eleemosinam ipsius et devocionis nostre supplendam efficaciam, regali auctoritate fiscum nostrum qui dicitur vicus Levandriacus, alio autem nomine Pomponnus cum Sancta Maxencia et qualicumque omni exactione que de ponte ipsius loci partibus fisci seu partibus comitatus exigitur a jure nostro in dominium eorum transferendum. Sed postea previdentes importunum id esse serviciis regalibus, jam dictum fiscum cum prefata cellula usibus nostris revocavimus et in commutacione earum rerum tradimus ad memoratam casam Dei, una cum consensu jamdicti abbatis tociusque congregacionis ejus, cellulam que dicitur Islau, in honore sancti Michaelis constructam, sitam in pago Dorcassino super fluvium Arva, cum omnibus appendiciis sive reditibus suis. De rebus autem istis, sicut de ceteris omnibus quas sepe licta casa Dei tempore predecessorum nostrorum tenuit et nunc retinet, seu quascumque evo sequenti acquirere poterit, regali sanctione id sensimus observandum quod dive recordacionis genitor noster imperiali majestate decrevit vel quod nos anteriori nostro privilegio ubi donacionem fecimus suprascriptarum aliarumve rerum sanximus, id est ut sub plenissima nostra defensione et immunitatis tuicione consistant, quod nullus episcopus contra reverenda statuta apostolice sedis canonumque decreta, nullus judex publicus vel alia qualibet publica potestate persona predita ex eisdem rebus eos inquietare aut aliquid minuere vel exigere presumat freda, non tributa, non mansiones, nec paratas, nec theloneum, nec inferendas, non plancas ad pontes emendandos, nec fidejussores tollere aut homines tam ingenuos quam servos super terram eorum commanentes distringere, nec ullas publicas functiones aut redibiciones requirere temptet, sed quicquid exinde fiscus noster sperare poterat, totum in necessitatibus illorum et usibus pauperum et in restauracionibus ac luminaribus ecclesiarum proficiat. Dona eciam a parvitate earum rerum nulla exigantur, pariterque hostes invictos ad civitates sive ad castella custodienda seu quecumque publica obsequia eis concedimus. Placuit eciam de instrumentis cartarum rememorari quas anteriori precepto indulsimus ut, si qualibet negligencia perdite fuerint et aliqua infestacio contra ipsam casam Dei surrexerit, habeat locum usque ad nos ut a nostra serenitate dirimatur diversarum parcium causa, ut absque impedimento Domino servire et pro nostro tociusque publice rei statu et pro anima genitoris nostri devocius et inoffense supplicare valeant. Nostros quoque successores specialiter rogamus ut hoc nostrum pietatis opus sic conservent sicuti sua pia facta a suis posteris conservari exoptant, ut de pari voto eandem et ipsi nobiscum eternitatis gloriam mereantur. Et ut hec auctoritas concessionis commutacionisve sui vigoris perpetuam obtineat firmitatem, manu propria subter firmavimus et anuli nostri impressione eam signari jussimus.
Datum VIII idus marcii, anno III, indictione V, regnante Karolo gloriosissimo rege. Actum Vernemptas villa. In Dei nomine feliciter. Amen.