866, 16 janvier. — Senlis.
Charles le Chauve, à la prière d'Effroy (Haecfridus), abbé de Saint-Florent [-le-Vieil], qui lui a représenté la désolation du pays devenu inhabitable à la suite des invasions répétées des Normands, renouvelant la donation faite jadis par lui à l'abbé Didon, abandonne à Effroy et à ses moines la «cella» de Saint-Gondon-sur-Loire (Nobiliacus) en Berry, pour leur servir de refuge et y déposer le corps de saint Florent.
A. Original perdu.
B. Copie du xie s., incomplète, dans le Livre noir de Saint-Florent, Bibliothèque nationale, ms. lat. nouv. acq. 1930 (ancienne Bibliothèque de Cheltenham, n° 70), fol. viii, sous la rubrique: «Praeceptum inclyti regis Karoli ad Hecfridum abbatem, ubi ei largitur cellulam sancti Gundulfi ad transferendum in ea corpus sancti Florentii.»
C. Copie du xiie s., dans le Livre d'argent de Saint-Florent, Archives de Maine-et-Loire, H 3714, fol. 27 v°, sous le même titre, en partie rubriqué, qu'en B.
D. Copie du xiie s., incomplète, sans les souscriptions ni la date, dans le même Livre d'argent, fol. 55 v°.
E. Copie du xiiie s., dans le Livre rouge de Saint-Florent, Archives de Maine-et-Loire, H 3715, fol. 21 v°, sous la rubrique: «Privilegium Karoli regis de sancto Gundulpho.»
F. Copie de l'année 1294, dans un vidimus donné le 28 mars 1294 (n. st.) par Nicolas Boceaus, garde du sceau de la prévôté de Lorris, sous le sceau de la dite prévôté, Archives de Maine-et-Loire, H 3299, pièce n° 1, peut-être d'après A.
G. Copie du xviiie s., par Dom Housseau, Bibliothèque nationale, Collection de Touraine, vol. 1, fol. 116 v°, n° 92, d'après B.
H. Copie du xviiie s., par Dom Housseau, Bibliothèque nationale, Collection Moreau, vol. 2, fol. 48, d'après B.
I. Copie d'environ l'année 1851, par Marchegay, dans une copie du Livre noir, Archives de Maine-et-Loire, H 3712, fol. 8, d'après B.
J. Copie du xve s., dans un cartulaire de papier, Bibliothèque nationale, ms. lat. nouv. acq. 1931, fol. 10 v°, d'après E.
K. Copie partielle du xviie s., par André Du Chesne, Bibliothèque nationale, Collection Baluze, vol. 41, fol. 105 v°, d'après E.
L. Copie partielle, du xviie s., par Baluze, Bibliothèque nationale, vol. 72, fol. 5 v°, d'après un cartulaire de Saint-Florent.
M. Copie de l'année 1328, incomplète, sans les souscriptions ni la date, dans une copie faite le 2 avril 1328 (n. st.) sous le sceau de Saumur, Archives de Maine-et-Loire, H 3299, pièce n° 2, d'après un cartulaire, peut-être D.
N. Copie de l'année 1376, incomplète, sans les souscriptions, mais avec la date, dans une copie faite le 13 novembre 1376 sous le sceau de l'abbé de Saint-Florent, Archives de Maine-et-Loire, H 3299, pièce n° 3, d'après un cartulaire appelé Liber canonicarum litterarum, peut-être E.
a. Mabillon, Annales ordinis sancti Benedicti, t. II, p. 752, «ex archivo Glonnensi».
b. Baluze, Histoire généalogique de la maison d'Auvergne, t. II, p. 22, probablement d'après C.
c. Recueil des historiens de la France, t. VIII, p. 597, n° cxcv, d'après a.
d. P. Marchegay, Cartulaire du prieuré bénédictin de Saint-Gondon-sur-Loire, p. 10, n° 1, d'après B C D E.
e. M. Saché, Cartulaire de l'abbaye de Saint-Florent de Saumur, p. 14, n° ix.
Indiqué : Bréquigny, Table chronologique, t. I, p. 273.
Indiqué : Böhmer, Regesta, n° 1732.
Indiqué : F. Lot, Une année du règne de Charles le Chauve. Année 866, dans Le Moyen Âge, t. XV (1902), p. 394 et n. 1.
Le diplôme ci-dessous présente la donation de Saint-Gondon comme le renouvellement d'une donation faite jadis à l'abbé Didon, lequel était certainement abbé de Saint-Florent entre le 13 juin 845 (diplôme n° 71) et le 14 janvier 850 (diplôme n° 123). Le poème transcrit dans le Livre noir de Saint-Florent et publié en dernier lieu par Dümmler dans les Monumenta Germaniae (Poetae latini aevi Carolini, t. II, p. 146-149), sous le titre Versus de eversione monasterii Glonnensis, rapporte la donation faite à Didon comme un dédommagement offert par Charles le Chauve à l'abbaye de Saint-Florent qui venait d'être brûlée par Nominoé:
F. Lot a péremptoirement démontré (Nominoé et le monastère de Saint-Florent-le-Vieil, dans les Mélanges d'histoire bretonne, p. 41-57) que ce poème, présenté par les éditeurs successifs comme l'œuvre d'un contemporain, n'a aucune valeur historique et a été composé au plus tôt au xe siècle. Il en résulte que son auteur a connu la donation de Saint-Gondon à Didon soit par le présent diplôme, soit par un diplôme perdu qui aurait été expédié en faveur de Didon peu après la destruction de Saint-Florent par Nominoé, en 849, si destruction il y a eu (Lot, mém. cité, p. 47-48). On remarquera que le texte du diplôme ci-dessous ne dit pas qu'il y a eu alors expédition d'un précepte: «... oravit [Haecfridus] ... ut... concedere sibi dignaremur cellam... quemadmodum praedecessori illius Didoni quondam abbati nos fecisse cognoscitur». Il peut s'agir d'une simple donation verbale et c'est pourquoi nous n'avons pas inséré dans ce recueil la mention d'un diplôme perdu, délivré à cette occasion.
Quoi qu'il en soit, l'assertion du diplôme n'est en aucune façon renforcée par le témoignage du poète. On remarquera que dans le distique précédent, celui-ci avait rapporté la donation à Saint-Florent de l'abbaye angevine de Saint-Jean. Or, le diplôme qui documente cette donation est un acte apocryphe, qui se donne la date du 8 juin 848 et dont on trouvera le texte parmi les diplômes faux. Le faussaire et le poète ont transposé en «abbatiam sancti Johannis in pago Andegavensi» la «villam in pago Andecavo non longe ab alveo Ligeri sitam quae appellatur Johannis villa», donnée par Charles le Chauve au monastère de Saint-Florent, alors gouverné par l'abbé Didon, le 23 juillet 848 (diplôme n° 109).
Texte établi d'après les copies B à F.
In nomine sanctae et individuae Trinitatis. Karolus gratia Dei rex. Quicquid pro utilitate ac necessitate servorum Dei facere contendimus profuturum nobis et ad aeternam beatitudinem facilius obtinendam et praesentem vitam felicius transigendam procul dubio confidimus. Itaque noverit omnium sanctae Dei Ecclesiae fidelium nostrorumque, tam praesentium quam et futurorum, sollertia quia venerabilis vir et religiosus abba Haecfridus monasterii beati Florentii una cum monachis ibi Deo militantibus ad nostram accedens sublimitatem, miserabili auditu, lacrimabili suggestione exposuit mansuetudini nostrae calamitatem praefati monasterii cȩteramque miseriam ipsius regionis pro peccatis nostris ab inimicis Dei cruentissimis Normannis crudeliter sepius illatam, ita ut eadem provincia quondam visu pulcherrima in solitudinis faciem penitus videatur redacta. Quare, sicut et aliis incolis quondam illius plagȩ, multo magis quoque monachis superius dicti monasterii, ejusdem religiosi viri abbatis cura providendis, in eodem loco penitus exclusa est habitatio. Igitur oravit suppliciter idem venerandus abbas ut ad suorum refugium monachorum et ad receptionem sacratissimi corporis beati Florentii concedere sibi dignaremur cellam secus fluvium Ligerim in pago Biturico quae dicitur Nobiliacus, quemadmodum praedecessori illius Didoni quondam abbati nos fecisse cognoscitur, in qua cella sanctus Gundulfus reverenter colitur humatus, quatinus a manibus suprascriptorum inimicorum Dei se evasisse exultantes requiem ibidem de tanta persecutione tandem mereantur, Christo propitio, invenire et in laudem divine misericordiae valeant respirare. Nos autem, supplicibus ejusdem Hȩcfridi abbatis monachorumque ejus precibus benignum assensum praebentes, altitudinis nostrae prȩceptum hoc fieri jussimus, per quod memoratam sancti Gundulfi cellam cum familia utriusque sexus et rerum omnium aliarum plenitudine sepe dicto venerando abbati Hecfrido suisque monachis habendam concedimus atque largimur, videlicet ut, pro nomine Domini et peccatorum nostrorum ablutione, monasterium illud cum omnibus sibi pertinentibus rebus ab eodem Hecfrido reverendo abbate successoribusque ejus secundum regularis institutionis ordinem omnimodis agatur et sine cujuspiam contradictionis inquietudine regulariter disponatur ad utilitatem ac necessitatem servorum Dei nostris futurisque temporibus secundum sacrae institutionis normam sancti Benedicti ibidem Deo servientium atque famulantium. Ut autem haec nostrae auctoritatis delegatio perpetuum in Dei nomine obtineat firmitatis vigorem, manu propria subter eam firmavimus anulique nostri impressione assignari jussimus.
Signum (Monogramma) Karoli gloriosissimi regis.
Hildeboldus indignus diaconus ad vicem Hludovici recognovit et [s].
Data XVII kal. feb., indictione XIIII, anno XXVI regnante Karolo gloriosissimo rege. Actum Silvanectis civitate. In Dei nomine feliciter. Amen.