843 ou 844, 30 décembre. — Saint-Martin de Tours.
Charles le Chauve, à la prière de l'abbé Oacre (Audacher), confirme l'exemption de tout tonlieu concédée par ses prédécesseurs aux bateaux du monastère de Saint-Paul de Cormery naviguant sur la Loire, l'Allier, le Cher, la Vienne, la Mayenne, la Sarthe, la Seine, le Loir et les autres rivières du royaume, accorde qu'un marché hebdomadaire soit tenu auprès du monastère, ainsi qu'un marché annuel le jour de la conversion de saint Paul (25 janvier), le tout sans intrusion des pouvoirs publics et sans prestation de cens, et confirme un échange conclu entre le dit abbé et Oursmer (Ursmarus), [arch]evêque de Tours.
A. Original perdu.
B. Copie de l'année 1551, dans l'Historia Sancti Pauli Cormaricensis de Joachim Périon, Bibliothèque de Tours, ms. 1349, fol. xviv°, sous le titre: «Praeceptum Caroli Calvi, regis Francorum, de navibus liberis Cormariceni cenobii et de mercatu solenni quavis hebdomada et nundinis anniversariis VIII cal. februarias».
C. Copie du xviie s., par André Du Chesne, Bibliothèque nationale, Collection Baluze, vol. 47, fol. 152 bis, sous le même titre que B, «ex chartulario S. Martini Turonensis».
D. Copie du xviiie s., Bibliothèque nationale, Collection de Touraine, vol. 1, fol. 57, n° 47, d'après B.
E. Copie du xviiie s., Bibliothèque nationale, collection Bréquigny, vol. 46, fol. 44, d'après D.
a. Recueil des historiens de la France, t. VIII, p. 450, n° xxviii, «ex archivo hujus monasterii» (Cormaricensis), (année 843).
b. Gallia Christiania, t. XIV, instrumenta, col. 30, «ex archivo».
c. J.-J. Bourassé, Cartulaire de Cormery, t. XII, p. 32, n° xvi, d'après B.
Indiqué : Bréquigny, Table chronologique, t. I, p. 211, (année 843).
Indiqué : Böhmer, Regesta, n° 1549, (année 843).
Indiqué : Lot et Halphen. Le règne de Charles le Chauve, p. 88, n. 1 et p. 130, n. 1.
Ce diplôme et les trois suivants sont datés de la cinquième année du règne. Il semble donc normal de placer leur expédition en décembre 844 et janvier 845. F. Lot (ouvrage cité, p. 88, n. 1), estime qu'il faut la reporter à la fin de 843 et au début de 844. «Le chiffre de l'indiction (7) ne convient pas à la fin de 844, encore moins à 845, mais à la période qui s'étend du 1er septembre 843 au 31 août 844. Surtout on ne voit absolument pas la raison pour laquelle le roi, à Saint-Denis le 9 décembre 844, au concile de Ver, près Senlis, le même mois, aurait fait un voyage précipité en Touraine à la fin de décembre 844 pour se retrouver dans la vallée de l'Oise à Compiègne le 21 janvier 845». Il y a là deux présomptions. Elles ne constituent pas des preuves décisives. Les erreurs dans le calcul de l'indiction sont trop fréquentes pour qu'on puisse donner à cet élément de datation la préférence sur l'année du règne. En tout état de cause, il n'est pas sûr que le style indictionnel du 1er septembre ait été employé régulièrement à la chancellerie de Charles le Chauve. D'autre part, un pèlerinage à Saint-Martin de Tours aux environs de la fête de Noël n'est pas exclu par les données de l'itinéraire. F. Lot a noté lui-même ailleurs (ouvr. cité, p. 130, n. 1) que le passage du roi à Ver devait être placé avant le 9 décembre. Ce qui nous a déterminé à placer ces diplômes dans la série chronologique à la fin de 844 et au début de 845, tout en laissant subsister une incertitude sur la date réelle de leur expédition, c'est le titre que prend Jonas dans la souscription de chancellerie apposée au bas du présent acte. Alors que le 27 décembre 843 (n° 30), il s'intitule notarius, il fait suivre ici son nom de la qualité de diaconus. Il n'y a aucune raison liturgique de placer la collation d'un ordre sacré entre le 27 et le 30 décembre.
Les diplômes d'exemption de tonlieux auxquels il est fait allusion sont ceux de Charlemagne, en date du 2 juin 800 (Böhmer-Mühlbacher, Die Regesten, n° 354 (345); publié dans le Recueil des historiens de la France, t. V, p. 764, n° lxxxii, par Bourassé, Cartulaire de Cormery, p. 9, n° iii et par Mühlbacher, Diplomata Karolinorum, t. I, p. 257, n° 192), de Louis, roi d'Aquitaine, en date du 7 avril 808 (Böhmer-Mühlbacher, n° 518 (499); publié dans le Recueil..., t. VI, p. 453, n° ii et par Bourassé, p. 13, n° v) et de Pépin Ier, roi d'Aquitaine, en date du 25 février 831 (Böhmer, Regesta, n° 2073; publié dans le Recueil..., t. VI, p. 670, n° xi, par Bourassé, p. 20, n° viii et par L. Levillain, Recueil des actes de Pépin Ier et de Pépin II, p. 59, n° xvii). Dans les trois diplômes précités l'exemption n'est accordée que pour deux bateaux et la rédaction est sensiblement différente de celle du texte ci-dessous. Par contre, on reconnaît dans celui-ci l'influence de la formule 22 des Formulae imperiales (Zeumer, Formulae merovingici et carolini aevi, p. 302). La clause relative au marché est propre au diplôme de Charles le Chauve. Quant à l'échange entre Oacre et l'archevêque Oursmer, (Bourassé, p. 31, n° xv), il avait été conclu le 26 novembre 843 ou 844 (Lot, ouvr. cité, p. 88, n° 1).
In nomine sancte et individue Trinitatis. Carolus gratia Dei rex. Si petitionibus servorum Dei divini cultus amore aurem libenter accommodamus eorumque necessitatibus consulimus, id nobis non tantum ad statum regni nostri corroborandum atque presentis evi salutem, verum etiam ad futuram capessendam sine dubio profuturum non ambigimus. Idcirco notum sit omnibus episcopis, abbatibus, ducibus, comitibus, vicariis, centenariis, teloneariis, actionariis et missis nostris discurrentibus et omnibus rem publicam administrantibus seu ceteris fidelibus sancte Dei Ecclesie nostrisque, tam presentibus quam futuris, quoniam venerabilis Audacher, abbas ex monasterio Cormaricensi constructo in honore beati Pauli, patroni nostri, preclarissimi doctoris gentium, ubi congregatio monachica sub eodem abbate monachico vivit jure, petiit culmen dignitatis nostre benivolentie, ob amorem Dei et reverentiam sancti Pauli atque salutem nostre anime sive status regni nostri, ut immunes ab omni teloneo naves, quotquot sint necessarie, per alveum Ligeris, Elarium, Carum, Vigennam, Meduanam, Sartam, Sequanam et Ledim vel per cetera diversa flumina ob necessitates ipsius monasterii fulciendas discurrere nostra regalis decerneret auctoritas, sequens morem prȩcedentium regum, ut scilicet teloneum quod annuis recursibus fiscus ex eorum navibus jure exigere poterit, ad luminaria basilice beati Pauli fovenda augmentasset. Insuper etiam petiit majestatem pietatis nostre ut in omni hebdomada absolute mercatum juxta idem monasterium possit habere et aliud mercatum annuale in festivitate conversionis beati Pauli, VIII kal. februarii, absque aliqua alicujus in aliquo contradictione aut judicum districtione aut alicujus census repetitione, atque ut ipsa commutatio que inter eundem abbatem et Ursmarum episcopum facta est, nostra regali preceptione firmaretur et in omnibus ita stabilis foret. Cujus precibus, ob amorem Dei et reverentiam beati Pauli, nobis annuere et hoc praeceptum munificentiȩ nostrȩ fieri libuit, per quod jubemus atque decernimus ut absque ullius judiciarię potestatis inquietudine aut theloneariorum detestatione liceat hominibus ejusdem abbatis suprafati suorumque successorum, ob necessitates prȩdicti monasterii et monachorum ibidem Deo servientium fulciendas, cum navibus, quotquot sint necessariȩ, libere ire et redire super nominata flumina seu etiam per cȩtera flumina regni nostri, et in quibuscumque civitatibus, oppidis, portibus ad ripam venerint, nullus ab eis aut ab hominibus qui eis prȩsunt, teloneum aut quod vulgari sermone dicitur ripaticum aut portaticum aut salutaticum aut cespiticum aut cenaticum aut pastionem aut laudaticum aut trabaticum aut ullum occursum aut ullum censum vel ullam redibitionem vel ceteras hujusmodi functiones publicas quȩ diversis nominibus vulgariter nominantur, quisquam aut accipere aut exigere penitus audeat aut aliquam inquietudinem de mercatu in omni hebdomada generali sive de mercatu annuali vel de commutatione jam dicta prȩsumat inferre, sed potius per hanc auctoritatem nostrȩ regalis prȩceptionis deinceps, remota cujuslibet illicita contrarietate vel deventione, omnia, ut supradicta sunt, in cunctis rata permaneant, ut necessitates ipsius monasterii absque alicujus fidelium nostrorum obstaculo procurari possint. Et ut hec auctoritas inviolabilem obtineat effectum et a fidelibus sanctȩ Dei Ecclesiȩ nostrisque verius credatur ac diligentius conservetur, manu propria subter firmavimus et anuli nostri impressione signari jussimus.
Signum Caroli gloriosissimi regis.
Jonas diaconus ad vicem Ludovici recognovit.
Data III kal. januarii, anno V, indictione VII, regnante Carolo gloriosissimo rege. Actum Turonis in monasterio sancti Martini. In Dei nomine feliciter. Amen.