844 ou 845, 5 janvier. — Saint-Martin de Tours.

Charles le Chauve, à la demande du comte Vivien, confirme la charte de précaire portant rétrocession à Amaury, à Milon et à Guichard et, après eux, à quiconque sera maître dans l'école de Saint-Martin de Tours, des biens cédés à Saint-Martin par le dit Amaury, à quoi le roi ajoute dix «quartae» [de terre], à charge pour les détenteurs d'enseigner gratuitement et de ne recevoir que des dons gracieux.

Référence : Arthur Giry, Maurice Prou, Georges Tessier et Ferdinand Lot (éd.), Recueil des actes de Charles II le Chauve, roi de France (840-860), Vol. 1, Paris, 1943, no63.

A. Original perdu.

B. Copie de l'année 1711, par Baluze, Bibliothèque nationale, Collection Baluze, vol. 76, fol. 43, d'après la Pancarta nigra, fol. 54, et la Pancarta alia, fol. 45, avec la mention: «Je l'ay corrigée sur l'original».

C. Copie du xviiie s., collationnée par Percier, conseiller maître à la Chambre des Comptes, Archives nationales, K 186, n° 15, sans indication de source.

D. Copie du xviie s., par André Du Chesne, Bibliothèque nationale, Mélanges Colbert, vol. 46, fol. 58, sans indication de source, probablement d'après la Pancarta alia.

E. Copie de l'année 1643, par Dom François Lesueur, Bibliothèque nationale, ms. lat. 13898, fol. 144, n° 148 (cf. ibid., fol. 55, n° 24), d'après la Pancarta alia, fol. 45.

a. Martène et Durand, Thesaurus novus anecdotorum, t. I, col. 33 (année 844), «ex cartario S. Martini».

b. Recueil des historiens de la France, t. VIII, p. 451, n° xxix (année 844), d'après a.

Indiqué : Georgisch, Regesta, t. I, col. 102 (année 844).

Indiqué : Bréquigny, Table chronologique, t. I, p. 212 (année 844).

Indiqué : Böhmer, Regesta, n° 1550 (année 844).

Indiqué : Mabille, La Pancarte noire, p. 89, n° xlvii, et p. 156, n° 44 (année 845).

Indiqué : Lot et Halphen, Le règne de Charles le Chauve, p. 88, n. 1 et p. 130, n. 1.

Le texte de la charte confirmée par Charles le Chauve nous a été conservé. Cette charte était transcrite deux fois dans la Pancarta nigra sous les numéros 35 et 117. En outre Baluze a vu l'original auquel il a conféré la copie qu'il avait tirée de la Pancarte noire. Cette charte est datée du mois d'août de la deuxième année du règne de Charles, c'est-à-dire d'août 841. Elle comprend: 1° la cession par le diacre Amaury à l'église Saint-Martin de Tours de ses biens, propres et acquêts, savoir deux manses à Marigny, en Touraine, viguerie d'Esvres, un autre manse à Alnarias en Blésois, dans le territoire de Cheverny; 2° la concession par Alard, abbé de Saint-Martin, à Amaury, Milon et Guichard, et, après eux, à quiconque leur succédera en l'école de Saint-Martin, des terres susdites avec ce qu'Amaury tient en bénéfice de l'abbé «in Fontanis, Curciaco sive Martiniaco, scilicet inter Calimacum et Puteum Mundatum mansos duos et medium», à charge pour les maîtres qui jouiront du revenu de ces terres d'enseigner gratuitement.

Cette charte et le précepte royal confirmatif sont visés dans un jugement d'entre 879 et 882, probablement du 18 janvier 881. Guichard, alors doyen de Saint-Martin, se présente devant l'abbé Hugues, se plaignant qu'un vassal nommé Guillaume se soit emparé de la villa de Martigny, alors qu'il la tenait en bénéfice en vertu de la précaire concédée par l'abbé Alard, sur quoi d'ailleurs il avait un précepte royal, «unde et praeceptum regale habebat». L'abbé Hugues ordonne une enquête. L'enquête terminée, les juges s'assemblent, et, devant eux on donne lecture des titres sur quoi Guichard appuyait sa revendication: «ibique recitatae sunt auctoritates per quas Guichardus hoc quod repetebat, scilicet mansos duos et dimidium ex villa Martiniaco inter Catinacum et Puteum Mundatum, per praecariam et praeceptum domni regis Karoli juste et legaliter tenere debuisset». On voit que les titres produits par Guichard étaient la charte que nous avons analysée plus haut et le précepte royal que nous publions ci-dessous.

Le précepte royal est encore rappelé dans une charte de Robert, abbé de Saint-Martin, du 30 juillet 894, confirmant la dotation des écolâtres, et, plus précisément, investissant Oury, maître de l'école, du bénéfice de Martigny sis entre Chatigny et Puteus Mundatus, comme successeur d'Amaury, de Milon, de Guichard et d'Ermengier. Oury offrait de montrer ses titres et notamment le précepte que l'abbé Vivien, successeur d'Alard, avait obtenu du roi Charles en faveur de l'école: «Adalardus..... easdem res eidem ministerio delegaverat, et super hoc praeceptum a magno Karolo in opus scolae, successor illius, Vivianus abba, impetraverat».

Notre diplôme, invoqué et produit par Guichard, puis par Oury, existait donc certainement vers 880. Une confirmation royale d'un acte tel que celui d'août 841 est d'autre part tout à fait vraisemblable. Mais comment expliquer la présence d'une invocation calquée sur celle des diplômes de Louis le Pieux, avec omission du mot «Dei», comme dans le diplôme précédent, et de la formule «divina providentia rex» qui rappelle celle du même empereur avant 834: «divina ordinante providentia imperator augustus»? Ces réminiscences sont d'autant plus singulières qu'il ne s'agit pas d'une confirmation d'un diplôme de Louis.

Comme on l'a fait remarquer à propos de l'acte précédent (n° 62), les diplômes du chartrier de Saint-Martin ont dû être à un moment donné l'objet d'une réfection générale. Dans ce cas, le document vu par Baluze ne serait qu'un pseudo-original. — En ce qui concerne la date, voir la note critique placée avant le texte du diplôme n° 60. — Sauf indication contraire, l'orthographe est celle de B. La copie C remplace partout ae par e.

Pour une actualisation et correction de ces remarques, voir notre article Les diplômes carolingiens de Saint-Martin de Tours, dans les Mélanges d'histoire du Moyen Âge dédiés à la mémoire de Louis Halphen, p. 683-691.


Texte établi d'après BCD.

In nomine <Domini et Salvatoris nostri Jesu Christi>. Karolus <divina providentia>rex. Quotienscumque enim petitionibus fidelium nostrorum pro quibuslibet ecclesiasticis necessitatibus aures nostras pulsantium libenter annuimus et ad divinae potentiae in locis Deo dicatis famulandum opem ferimus, id omnino ad statum regni nostri plenius muniendum temporalemque vitam melius deducendam necnon etiam futuram felicius capessendam commodum fore minime dubitamus. Idcirco noverit omnium fidelium sanctae Dei Ecclesiae nostrorumque industria, videlicet tam praesentium quam futurorum, quia venerabilis fidelis noster Vivianus comes suggessit culmini dignitatis nostrae quod quidam levita ex coenobio praeclarissimi confessoris Christi sancti Martini, peculiaris patroni nostri, nomine Amalricus, quoddam proprium hereditatis suae sive adtractus sui legaliter obtulerit Deo et sancto Martino deprecatusque fuerit per seriem precariae beneficiolum suum ex rebus ejusdem ecclesiae, eo scilicet tenore ut utrasque res diebus vitae suae idem Amalricus, Milo atque Guichardus habeant eorumque successor quicumque fuerit praeceptor in scola sancti Martini, nec inibi de doctrina quorumque discentium meritum recompensationis quaerant aut exigant nisi quod sponte oblatum sit, neque abbas ejusdem monasterii quilibet deinceps plus servitii alicujus muneris petat vel licentia exigendi ab his eorumque successoribus idem ministerium habentibus perfrui queat quam ut gratis in scola petita doceant necnon fidelissime ibi laborem docendi impendant. Igitur petiit serenitatem pietatis nostrae, ob amorem et honorem Domini reverentiamque beati Martini peculiaris [patroni] nostri, ut hoc ipsum nostra auctoritate dignaremur confirmare more regali. Nos quoque, salubri suggestione permoti, simul etiam hortatu atque interventu venerabilium virorum ad hoc perficiendum commoniti, hoc nostrae auctoritatis praeceptum fieri ac dare decrevimus, per quod constituimus atque perenniter firmum fore decernimus ut, sicut superius dictum est et in serie precariae videtur insertum esse, sic in honorem loci et cumulum mercedis nostrae sive Viviani, fidelissimi nostri, firmum permaneat omni tempore. Insuper etiam addimus X quartas per hanc nostrae praeceptionis auctoritatem in ipsa eademque conditione praedicta quae nuper eidem Amalrico concessa fuerant in beneficium habenda. Unde monemus quoque omnes qui nobis in regno a Deo commisso successuri sunt ut, sicut sua statuta a successoribus suis conservari velint, ita in omnibus hanc nostram praecepti auctoritatem super precariam actam ad eam confirmandam immutabiliter perpetuis temporibus conservare studeant ad suam et nostram communem utilitatem sive salutem. Et ut haec nostrae auctoritatis praeceptio firmior habeatur ac per futura tempora melius conservetur, manu propria subter eam firmare decrevimus et de anulo nostro sigillari jussimus.

Signum (Monogramma) Karoli gloriosissimi regis.

Bartholomaeus notarius ad vicem Hludowici recognovit et subscripsit.

Data nonas januarii, anno quinto regnante domno Karolo gloriosissimo rege, indictione septima. Actum Turonis in monasterio sancti Martini. In Dei nomine feliciter. Amen.


Localisation de l'acte

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