889, 14 décembre. — Laon.

Eudes, à la requête de l'évêque [de Paris] Askericus et sur présentation par l'évêque de Langres Argrimus des diplômes de ses prédécesseurs Louis [le Pieux], Charles [le Chauve], Charles [le Gros] et autres rois, confirme les biens de l'église de Langres, notamment les remparts de la cité où est l'église de Saint-Mammès, le « castrum » de Dijon où est l'église Saint-Étienne et, à côté, l'abbaye de Saint-Bénigne, l'abbaye de Molosmes en Tonnerrois, le « castrum » de Tonnerre, chef-lieu du comté (caput comitatus), la petite abbaye de Saint-Symphorien de Ligny, l'abbaye de Saint-Pierre en la cité de Langres, celle de Saint-Geômes près de Langres, celle de Bèze en Atuyer et d'autres petites abbayes et possessions, et, de plus, les châteaux (castella) de Bar et de Mémont, les marchés et les monnaies ; il confirme en outre le privilège de l'immunité, abandonnant à l'église de Langres ce que le fisc était en droit d'exiger d'elle, à charge de prières pour lui et le royaume.

Référence : Georges Tessier et Robert-Henri Bautier (éd.), Recueil des actes d'Eudes roi de France (888-898), Paris, 1967, no15.

A. Original. Parchemin jadis scellé. Hauteur : 685 mm, largeur : 534 mm. Archives départementales de la Haute-Marne, G 2, n° 7 (anc. G 1, n° 15).

B. Copie de la première moitié du xiiie siècle, dans le Grand cartulaire du chapitre de Langres, Archives départementales de la Haute-Marne, G non coté, fol. 117 (anc. 96), sous la rubrique : « Littere Odonis piissimi Francorum regis super confirmatione omnium acquisitorum et acquirendorum », d'après A.

C. Vidimus du 8 décembre 1279, par l'official de Langres, Archives départementales de la Haute-Marne, G 2, n° 71, d'après A.

D. Vidimus de décembre 1284 par l'évêque de Langres, l'abbé de Saint-Étienne de Dijon et l'official de Langres, Archives départementales de la Haute-Marne, G 2, n° 72, d'après A.

E. Copie du xviie siècle, Archives départementales de la Haute-Marne, G 2, n° 73, d'après A.

F. Copie du xviie siècle, Bibliothèque nationale, ms. lat. 13872, p. 121 d'après B.

G. Copie du xviiie siècle, Bibliothèque nationale, Collection de Bourgogne, vol. 8, fol. 423, d'après B.

H. Copie du xviiie siècle pour dom Bouquet, Bibliothèque nationale, nouv. acq. fr. 22211, fol. 73.

I. Copie incomplète du xviiie siècle, Bibliothèque nationale, nouv. acq. fr. 7331 (anc. Collection de Camps, vol. 3), fol. 167, d'après B.

J. Copie incomplète et fautive du xviiie siècle, Bibliothèque nationale, Collection Fontanieu, vol. 1-2, fol. 486, d'après I.

a. [Abbé Claude Fyot de la Marche], Histoire de l'église abbatiale et collégiale de Saint-Étienne de Dijon, preuves, p. 14, n° 31, d'après B.

b. Gallia christiana, t. IV, instrumenta, col. 135, n° XI, d'après A.

c. Recueil des historiens de la France, t. IX, p. 449, n° XI, d'après b.

d. M. Quantin, Cartulaire général de l'Yonne, t. I (1854), p. 124, n° LXIII, d'après c.

e. A. Roserot, Diplômes carolingiens originaux des Archives de la Haute-Marne, dans Bulletin de la Société des sciences historiques et naturelles de l'Yonne, t. XLVII (1893), p. 527, n° 16, et à part, 1894, p. 25.

Fac-similé : Lot et Lauer, Diplomata Karolinorum, fasc. VII, pl. XIII (Eudes, n° 3).

Indiqué : Bréquigny, Table chronologique, t. I, p. 344.

Indiqué : Böhmer, Regesta, n° 1881.

Indiqué : A. Roserot, Répertoire historique de la Haute-Marne, 2e partie, p. 112, n° 71.

Indiqué : A. Roserot, Catalogue des actes royaux conservés dans les Archives de la Haute-Marne, dans Le Bibliographe moderne, 1903-1905, n° 30.

Indiqué : E. Favre, Eudes, p. 129.

Indiqué : G. Chevrier et M. Chaume, Chartes et documents de Saint-Bénigne de Dijon, t. 2 (1943), Catalogue sommaire des pièces antérieures à 990, n° 131, p. XLI.

Le diplôme d'Eudes, conservé en original, est d'une sincérité certaine, à la différence d'autres diplômes royaux pour l'église de Langres et il constitue par là même un des éléments de base sur lequel doit s'appuyer toute étude critique des diplômes carolingiens conservés dans le chartrier langrois. Il est en effet écrit de la main même du notaire-chancelier Throannus, parfaitement reconnaissable ici, ce notaire ayant écrit aussi bien le texte que le protocole final. Le diplôme a donc été établi à la chancellerie même et non pas, comme les autres diplômes du chartrier, dans l'entourage de l'évêque de Langres.

Le rédacteur n'en a pas moins utilisé et partiellement reproduit mot à mot les passages interpolés du diplôme de Louis le Pieux du 9 septembre 814, lesquels contiennent la liste des biens de l'église de Langres : l'enceinte de la cité, le « castrum » de Dijon et celui de Tonnerre, et de nombreuses abbayes. Il utilise également, dans la partie relative à l'immunité, les formules développées de ce même diplôme de Louis le Pieux telles qu'elles existent dans sa forme sincère alors qu'elles ont été abrégées dans sa version falsifiée. Nous pensons quant à nous que la falsification de ce diplôme, dont le pseudo-original nous a été conservé, a été faite précisément pour servir de base à la requête de l'évêque Argrimus auprès d'Eudes.

On pourra s'étonner que la chancellerie d'Eudes se contente d'une simple allusion aux diplômes délivrés à l'église de Langres par Charles le Gros, alors que le chartrier langrois en renferme aujourd'hui encore une fort belle série. Même des concessions capitales, comme la remise à l'évêque des biens fiscaux détenus par le comte à l'intérieur de l'enceinte faite en vertu du précepte du 15 janvier 887, ne sont pas mentionnées par Eudes et on doit y voir, pensons-nous, le reflet d'une pensée politique contraire à l'abandon des droits régaliens. Dans d'autres cas, tels que la concession à l'évêque des abbayes de Saint-Seine et de Réomé ou celle de la « villa » d'Ulmos au « pagus » de Troyes, l'absence de toute référence aux mesures de Charles le Gros tient au fait que les diplômes de celui-ci ont été, croyons-nous, forgés ou falsifiés à la fin du ixe siècle. Sur ces questions complexes posées par le chartrier de l'église de Langres, voir notre mémoire à paraître dans les Annales de Bourgogne.

Nous imprimons ci-après en petits caractères les passages empruntés à l'une ou à l'autre version du diplôme de Louis le Pieux du 9 septembre 814.


(Chrismon) In nomine sanctae et individuae Trinitatis. Odo clementia Dei rex. Si sacerdotibus in quibuslibet necessitatibus ecclesiasticis nostra auctoritate sublevandis consulimus et ad ministerium suum [2] liberius exsequendum opem ferimus, a summo pontificae, domino nostro Jhesu Xpisto, aeternae remunerationis largiri nobis premia non ambigimus. Quapropter notum sit omnibus sanctae Dei Ecclesiae fidelibus et nostris, presentibus scilicet et futuris, quia Argrimus, sanctae Lingonensis ecclesiae reverendus [3] antistes, nostram adiens celsitudinem, obtutibus nostris precepta et auctoritates regum scilicet et imperatorum, nostrorum videlicet antecessorum, obtulit, Hludowici nempe imperatoris seu et Karoli filii ejus, nihilominus imperatoris, necnon et Karoli nepotis illius, similiter imperatoris, aliorumque regum, [4] qualiter ipsi abbatias, castra, villas aliasque diversarum rerum possessiones jamdictę ecclesiae Lingonensi delegaverunt et ablata reddiderunt atque, ut ibi perpetuo permanerent, sua auctoritate confirmaverunt : munitionem videlicet Lingonice civitatis, ubi habetur ecclesia in honore beati Mammetis, [5] eximii martyris ; et castrum Divionensae, in quo sita est ecclesia in honore sancti Stephani protomartyris, et juxta, monasterium Sancti Benigni, cum omni eorum integritate ; et, im pago Tornotrensi, monasterium Melundense, et, in eodem pago, castrum Tornotrense, caput videlicet comitatus ; et abbatiolam [6] Sancti Simphoriani in Ladiniaco, cum ecclesiis aliisque rebus sibi aspicientibus ; et, infra muros jamdictae Lingonis civitatis, abbatiam Sancti Petri, et, juxta eandem civitatem, monasterium Sanctorum Geminorum cum omnibus sibi competentibus ; et, im pago Atoariorum, monasterium Besuense cum omni [7] sua integritate, sive etiam alias abbatiolas aliarumque diversarum rerum possessiones, quas hęc eadem Lingonensis ecclesiae juste et legaliter quieto ordine obtinere videtur. Obtulit etiam et immunitates et auctoritates ex castellis Barro scilicet et Magnomonte, necnon et ex mercatis [8] et monetis, qualiter a supradictis antecessoribus nostris confirmatae fuissent et supradictae ecclesiae delegatae et ad jus illius rectorumque ejus ordinationem perpetuo absque alicujus judicis inquietudine pertinere debuissent. Hujus itaque rei causa, ad nostram se colligens majestatem, humiliter deprecatus est [9] quatinus, pro Dei omnipotentis amore et supra memoratorum sanctorum obtentu, ex his omnibus supra memoratis vel etiam ex his quae futuris temporibus a Deo timentibus aliquando eidem ecclesiae restitutae sunt, tale auctoritatis nostrae preceptum facere juberemus, per quod haec eadem ecclesia omnia supra memorata, absque alicujus [10] inquietudine, in Dei nomine, obtinere valeret. Cujus nos saluberrimis postulationibus aurem nostrae serenitatis accomodantes, ob deprecationem Askerici, venerabilis episcopi, necnon et ob amorem supra memorati Argrimi episcopi, hoc precepti nostri edictum fieri jussimus, per quod statuentes decernimus et ex nostra [11] regali auctoritate confirmamus ut quemadmodum supra memorata monasteria, abbatiae aliarumque re[rum] possessiones, monetae etiam, castella atque mercata, insuper et omnia quae jamdicta ecclesia juste et legaliter obtinere videtur necnon et ex monetis, mercatis atque castellis, sicut ab ante-[12]-cessoribus nostris regibus scilicet et imperatoribus ordinatum est, sic, absque alicujus inquietudine seu temeraria presumtione aut repetitione sive diminoratione seu etiam et comitum vel judicum presumtiva occasione, haec eadem Lingonensis ecclesia obtineat atque per futura tempora quieto ordine possideat. Similiter namque [13] per hanc precepti nostri auctoritatem ex immunitatibus ejusdem ecclesiae decernendo sancimus ut nemo fidelium nostrorum vel quilibet ex judiciaria potestate in ecclesias, agros aut loca sive reliquas possessiones a rectoribus ipsius ecclesiae legaliter possessas, et per auctoritates antecessorum nostrorum postea ad partem ipsius ecclesiae [14] confirmatas in quibuslibet locis vel territoriis infra ditionem totius regni nostri eadem memorata tenet vel possidet ecclesia vel eas quae deinceps a catholicis viris eidem conlatae fuerint ecclesiae, ad causas audiendas aut freda vel tributa exigenda aut mansiones vel paratas faciendas aut fidejussores tollendos [15] aut homines ipsius ecclesiae tam ingenuos quam servos super terram ipsius commanentes distringendos nec ullas redibitiones aut inlicitas occasiones requirendas, nostris et futuris temporibus, ingredi audeat vel ea quae supra memorata sunt exigere penitus presumat, sed liceat memorato pręsuli [16] suisque successoribus res predictae ecclesiae cum omnibus sibi pertinentibus, sub immunitatis nostrae defensione quieto ordine possidere et nobis fideliter deservire atque pro stabilitate nostra vel totius regni a Deo nobis collati vel conservandi, una cum clero et populo sibi subjecto libere Dei misericordiam exorare [17] et, quicquid exinde fiscus noster exigere debet, ad integrum predictae ecclesiae concedimus, ut perpetuis temporibus ibidem proficiat in augmentum. Et ut hoc nostrae auctoritatis edictum pleniorem inviolabilemque obtinere valeat firmitatis per futura tempora vigorem, manu propria subter [18] firmavimus atque anuli nostri impressione insigniri jussimus.

[19] Signum Odonis (Monogramma) gloriosissimi regis.

[20] (Chrismon). Throannus notarius ad vicem Eblonis recognovit et subscripsit (Signum recognitionis et locus sigilli).

[21] Datum XVIIII kalendas januarii, indictione .VII., anno Incarnationis dominicae DCCCLXXXVIIII, anno. Ii. regnante domno Odone, gloriosissimo rege. Actum Lucduno clavato. In Dei nomine, feliciter. Amen.


Localisation de l'acte

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