889, 13 juin. — Abbaye de Saint-Mesmin.

Eudes, renouvelant à la requête de l'abbé Ucbert (Ugobertus), un précepte du roi [Charles], son prédécesseur, met sous la protection royale et celle de l'immunité l'abbaye de Saint-Jean-Baptiste de Montolieu (Mallast) avec toutes ses dépendances : les « villulae » dites « Villa Segarii », « Villa Addarii », Villeginion et le « villare » d'Alzau dit aussi « Villa Fedosii », tous sis sur la Dure ; le « villare » de Saint-Étienne et la « villa » de Villelisses sur le Fresquel ; en Razès, le lieu de Saint-Vincent dans la « villa Ceria » ; en Razès et en Carcassès, la « villa » de Villeneuve[-lès-Montréal] ; en Toulousain, le « villare » de [Saint-Rome de] « Magnianacum » sur le Fresquel ; en Carcassès, les « cellulae » de Saint-Martin[-le-Vieil] sur le Lampy, de Sainte-Cécile [de Cuxac-Cabardès] et de Saint-Pierre [de Caudebronde] sur la Dure, le « locus » dit « Oratorium » et, sur le Linon, le « villare » dit « Eleci ». Le roi abandonne en outre le produit des droits susceptibles d'être perçus par le fisc sur lesdits biens et confirme à la communauté la liberté des élections abbatiales.

Référence : Georges Tessier et Robert-Henri Bautier (éd.), Recueil des actes d'Eudes roi de France (888-898), Paris, 1967, no1.

A. Original perdu.

B. Copie collationnée par Gratian Capot, le 28 juin 1668, Bibliothèque nationale, Collection Doat, vol. 69, fol. 22 v°-24, d'après A et un « extraict » fait par le juge mage de Carcassonne, le 13 avril 1345, aujourd'hui perdu, mais alors conservé aux archives de l'abbaye de Montolieu.

C. Copie de la fin du xviie siècle, Bibliothèque nationale, ms. lat. 11897, fol. 160, « ex archivo monasterii Montisolivi ».

D. Copie incomplète du xviie siècle, Bibliothèque nationale, ms. lat. 12686 (Monasticon Benedictinum, t. XXIX), fol. 336 v°, d'après la copie de 1345 signalée en B.

E. Copie du xviie siècle par Dom Dulaura, Bibliothèque nationale, ms. lat. 12687 (Monasticon Benedictinum, t. XXX : Synopsis rerum memorabilium abbatiae S. Johannis Battistae Montisolivi), fol. 13 v°, sans doute d'après la copie de 1345.

F. Copie du xviie siècle par Dom Dulaura, Bibliothèque nationale, ms. lat. 12687 (Monasticon Benedictinum, t. XXX), fol. 94, d'après E.

G. Copie partielle du xviie siècle, Bibliothèque nationale, ms. lat. 12686 (Monasticon Benedictinum, t. XXIX), fol. 327.

H. Copie du xviie siècle pour Dom Bouquet, Bibliothèque nationale, nouv. acq. fr. 22211, fol. 65, d'après a.

I. Copie partielle du xviie siècle, Bibliothèque nationale, ms. lat. 12760 (Antiquitatum in Septimania... benedictinarum pars prima), p. 411, d'après a.

a. Baluze, Capitularia regum Francorum, t. II, col. 1517, n° CXXII, « ex archivo monasterii Montisolivi », d'après C.

b. Recueil des historiens de la France, t. IX, p. 443, n° IV, d'après a.

c. Gallia christiana, t. VI, Instrumenta, col. 419, d'après a.

d. M. Mahul, Cartulaire et archives des communes de l'ancien diocèse et de l'arrondissement administratif de Carcassonne, t. I, p. 73 (incomplet).

Indiqué : Bréquigny, Table chronologique, t. I, p. 341.

Indiqué : Böhmer, Regesta Karolorum, n° 1873.

Indiqué : Favre, Eudes, p. 123, n. 5.

Le diplôme d'Eudes pour l'abbaye de Montolieu appartient à la série des diplômes expédiés de l'abbaye de Saint-Mesmin et d'Orléans en juin 889. Comme la plupart de ceux-ci, il présente des éléments de date discordants, aggravés ici par des erreurs certaines des copistes. L'année de l'Incarnation est 883 dans deux copies et 888 dans une autre copie qui a sans doute corrigé le texte primitif ; elle manque dans la quatrième. L'indiction est selon les copies : iv, vi ou viii ou bien encore elle est absente. Seule l'année du règne est assurée : anno II. Ce dernier élément nous invite à dater le diplôme de 889. Comme Favre l'a fait d'ailleurs remarquer (Eudes, p. 124, note), il ne peut être du 13 juin 888 — non plus que les autres diplômes datés d'Orléans — puisqu'il semble assuré que le 24 juin 888 Eudes écrasait une armée normande à Montfaucon en Argonne.

On notera qu'aucune souscription de chancellerie ne figure dans les copies, ce qui est dû vraisemblablement à la négligence du scribe de 1345 dont semblent dériver tous les textes qui nous sont parvenus.

L'acte d'Eudes reprend mot pour mot celui de Charles le Chauve du 30 juillet 854 (éd. G. Tessier, Charles le Chauve, t. I, n° 166, p. 434-438), à la seule exception du nom de l'abbé pétitionnaire, mais en y insérant les noms d'un certain nombre de biens : Alzau, Saint-Étienne, Villelisses, Saint-Vincent, Villeneuve et Eleci sur le Lignon. Nous n'y verrons cependant nullement une interpolation abusive : ces biens purent être donnés à l'abbaye entre 854 et 889 et tous, sauf le dernier, se retrouvent dans des documents relatifs à l'abbaye au début ou au milieu du xe siècle, notamment dans la bulle de confirmation d'Agapet II (cf. Mahul, op. cit., t. I, p. 78). Une allusion directe à ce diplôme est d'ailleurs faite au cours d'un procès en mall public sur la possession allodiale du domaine de [Saint-Rome de] Magnianacum en 918 : « et preceptum habet ipsa congregatio, ex regia authoritate, quod acquisivit Ugbertus, qui fuit quondam, ante Odone rege, de jam dicto villari » (Mahul, op. cit., t. I, p. 189).

Nous n'attacherons pas beaucoup d'importance au fait que, par suite d'une bévue, le scribe (sans doute celui de la copie de 1345) fasse confirmer par Eudes un diplôme d'Eudes ; il s'agit évidemment d'une simple erreur matérielle et la correction Karoli pour Odonis s'impose. C'est à tort qu'une des copies et l'édition de Baluze, copiées l'une sur l'autre, ont corrigé : Pippini.

Le décalque de l'acte de Charles le Chauve a été fait avec beaucoup de maladresse. Si son auteur est en effet qualifié au début piae recordationis serenissimi regis, par la suite le scribe, reprenant textuellement le texte de son modèle, en vient à écrire in manu ejusdem domini imperatoris, qui dans le contexte antérieur s'appliquait à Louis le Pieux. Autre fait analogue : l'abbaye était désignée dès le début du diplôme de Charles le Chauve comme située super fluvium Duranum, ce qui permettait ensuite de se référer simplement à ce fleuve (fluvium jam dictum) sans en répéter le nom ; le diplôme d'Eudes, tout en supprimant cette désignation initiale, n'en maintient pas moins ce mot jam dictum, sans autre précision, ce qui rendrait le sens inintelligible, si l'on n'avait pas sous les yeux l'acte de son prédécesseur.

Il convient de noter que la chancellerie de Charles le Chauve déjà n'avait fait que reproduire à peu près mot à mot le diplôme de Pépin Ier d'Aquitaine du 6 juin 828 (éd. L. Levillain, Pépin Ier... d'Aquitaine, p. 37, n° xi), sans d'ailleurs mentionner le nom de ce roi (sur ce fait, cf. G. Tessier, op. cit., t. I, p. 436) et tout en prétendant confirmer seulement le diplôme de Louis le Pieux du 8 décembre 815 (éd. Recueil des historiens de la France, t. VI, p. 485, n° XLI ; cf. Böhmer-Mühlbacher, Die Regesten..., n° 600).


In nomine sanctae et individuae Trinitatis, Odo gratia Dei rex. Cum petitionibus servorum Dei justis et rationabilibus divini cultus amore favemus, superna nos gratia pro his muniri non dubitamus. Proinde noverit omnium fidelium nostrorum praesentium futurorumque sagacitas quia vir venerabilis Ugobertus, abba ex monasterio quod nuncupatur Mallasti situm in territorio Carcassensi, constructum in honore sancti Johannis Baptistae, cum terminis et adjacentiis, obtulit obtutibus nostris quandam auctoritatem domini [Karoli] piae recordationis serenissimi regis, in qua erat insertum qualiter antecessoris sui antecessor ipsum monasterium a novo construxisset opere et propter ejus defensionem vel propter pravorum hominum illicitas infestationes in manu ejusdem domini imperatoris una cum monachis ibi degentibus se commendavit, ut sub ejus tuitione licuisset eos cum rebus hominibusque eorum quiete vivere ac residere, et deprecatus est clementiam regni nostri ut praefatum monasterium, una cum villulis quarum nomina sunt : villa Segarii seu villa Addarii necnon villa Junonis necnon villare qui dicitur Elisaus, qui alio nomine villa Fedosii, quae sunt super eundem fluvium sitae, seu villare qui vocatur Sancti Stephani et villa quae dicitur Micizani in eodem pago super fluvium Fiscanum, et in pago Redensi locum qui dicitur Sancti Vincentii in villa Ceria, et villa quae dicitur Anulvilla quae est sita in pago Redensi sive Carcassensi, villareque nomine Magnianacum in pago Tolosano super fluvium Fiscani, necnon et cellulam Sancti Martini praedicto monasterio subjectam super rivulum Lampium sive Sanctae Ceciliae et Sancti Petri super fluvium jam dictum Duranum, locum qui dicitur Oratorium, quae sunt in pago Carcassensi, villare qui dicitur Eleci super fluvium Lignanti, cum omnibus rebus et adjacentiis sive terminiis suis, sub nostra susciperemus defensione et immunitatis tuitione. Cujus precibus, ob amorem Dei et reverentiam divini cultus, libenter aurem accommodare placuit et hoc nostrae auctoritatis praeceptum fieri decrevimus atque jubemus, per quod praecipimus ut nullus judex publicus vel quislibet ex judiciaria potestate in ecclesias, loca vel agros seu reliquas omnes possessiones quas moderno tempore possidet vel quae etiam deinceps in jure ipsius sancti loci voluerit divina pietas augeri, ad causas audiendas aut freda exigenda aut mansiones vel paratas faciendas aut fidejussores tollendos aut homines ipsius monasterii tam ingenuos quam et servos super terram ipsius commanentes injuste distringendos nec ullas redibitiones aut illicitas occasiones requirendas nostris vel futuris temporibus ingredi audeat vel ea quae supra memorata sunt penitus exigere praesumat. Et quicquid de rebus praefati monasterii fiscus sperare potest, totum nos, pro aeterna remuneratione, praefato monasterio concedimus ut in alimonia pauperum stipendiaque monachorum ibidem Deo famulantium proficiat in augmentum. Et quandoquidem divina vocatione supradictus abba vel successores ejus de hac luce migraverint, quandiu ipsi monachi tales inter se invenire potuerint, qui ipsam congregationem secundum regulam sancti Benedicti regere valeant, scilicet qui praeesse pariter et prodesse queant, per hanc nostram auctoritatem licentiam habeant eligendi abbatem, quatenus pro nobis et totius regni nostri stabilitate a Deo nobis concessi jugiter Domini misericordiam exorare delectet. Et ut haec auctoritas a fidelibus sanctae Dei Ecclesiae et nostris verius credatur diligentiusque conservetur, manu propria subter firmavimus et anuli nostri impressione signari jussimus.

Signum Odonis gloriosissimi regis.

Datum idibus junii, anno Incarnationis dominicae dccclxxxviii, indictione [. .], anno ii° regni Odonis gloriosissimi regis. Actum in monasterio Sancti Maximini. In Dei nomine, feliciter. Amen.


Localisation de l'acte

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