[888, 29 février – 892, 30 septembre].

Eudes, à la requête de l'évêque de Laon, Dion (Dido), place à titre perpétuel les demeures et maisons de l'évêque et le cloître des frères de cette église sous la protection royale, s'interdisant à lui-même ainsi qu'à ses successeurs et à tout agent public, d'y pénétrer et d'y demeurer sans autorisation des intéressés.

Référence : Georges Tessier et Robert-Henri Bautier (éd.), Recueil des actes d'Eudes roi de France (888-898), Paris, 1967, no29.

A. Original. Parchemin jadis scellé. Hauteur : à gauche, 676 mm, à droite, 674 mm ; largeur : en haut, 513 mm, en bas, 522 mm, Bibliothèque nationale, collection de Picardie, vol. 283 (supplément à D. Grenier : « Chartes de l'église de Laon »), n° 1.

B. Copie du xiiie siècle, avec annotations, par Jacques de Vitry (Urbain IV), dans le Cartulaire rouge du chapitre de Laon, Archives départementales de l'Aisne, G 1850, fol. 250, d'après A.

C. Copie du xviiie siècle, collationnée et commentée par Dom Grenier, avec dessin des deux premières lignes et description du sceau, Bibliothèque nationale, Collection Moreau, vol. III, fol. 38, d'après A.

D. Copie du xviiie siècle par Dom Grenier, avec reproduction du monogramme et du sceau, Bibliothèque nationale, Collection de Picardie, vol. 110, fol. 4.

E. Copie du xviiie siècle, avec reproduction du monogramme et de la ruche, Bibliothèque nationale, Collection de Picardie, vol. 223, fol. 72, d'après A.

F. Copie de 1740, collationnée en la Chambre des comptes par le conseiller Lefaulche, avec reproduction du monogramme, Archives nationales, K 176, n° 48, d'après A.

G. Copie du xviie siècle, Bibliothèque nationale, Collection Du Chesne, vol. 22, fol. 309, d'après B.

H. Copie du xviie siècle, Bibliothèque nationale, ms. lat. 12703, fol. 138, d'après B.

I. Copie du xviiie siècle, Bibliothèque nationale, Collection de Picardie, vol. 267 (Preuves de l'histoire de Laon, par Dom Brugnâtre), fol. 56, d'après B.

a. E. Favre, Eudes, pièces justificatives, n° III, p. 238, d'après A complété par C et F.

Fac-similé : Lot et Lauer, Diplomata Karolinorum, fasc. VI, pl. VIII (Eudes, n° 5) [888-891].

Ce diplôme est l'œuvre du notaire-chancelier Throannus, comme les nos 15, 18, 22, 30 et 32. Il présente la particularité unique sous le règne d'Eudes de ne pas comporter de date. Dans d'autres cas, nous ignorons la date, soit parce que le parchemin a été mutilé, soit parce que le texte ne nous est connu que par des copies postérieures. Mais ici nous possédons un original non daté, d'une authenticité indiscutable et qu'on sait avoir été effectivement expédié (l'acte a été conservé scellé jusqu'à l'époque moderne). On ne peut guère penser à une mutilation du parchemin : il comporte en effet une marge inférieure considérable : 11 cm au dessous de la recognitio de chancellerie, sans qu'on voie même un sommet de haste ; le parchemin est d'ailleurs de très grande dimension (plus de 67 cm de hauteur) et on ne peut que bien difficilement imaginer qu'on ait découpé au bas une bande relativement importante.

Au xviiie siècle on a cru pouvoir rapporter ce diplôme soit à 888 soit à 890. Au dos de l'original en effet, la date de 888 a été alors mentionnée, et dom Grenier (D) a indiqué : « vers l'an 888 ». Un ancien inventaire des chartes de l'église de Laon indique également la date de 888, tandis que la table du cartulaire B, dans les papiers de dom Grenier, indique circa 890.

La date en est en tous cas antérieure à la disparition d'Èbles de la chancellerie : sa dernière mention certaine comme chancelier est dans un diplôme du 15 juillet 891 (n° 27), la première de son successeur, Askericus, est du 30 septembre 892 (n° 30). Notre diplôme est donc antérieur à cette dernière date.

Un seul diplôme a été expédié de Laon par la chancellerie d'Eudes, le 14 décembre 889 (n° 15) : faut-il lier à ce séjour royal la requête de l'évêque en vue d'être désormais déchargé de l'obligation de recevoir le roi et sa suite dans son palais épiscopal ? Ou bien doit-on mettre ce diplôme en relation avec les circonstances beaucoup plus dramatiques d'avril 892 (ou de juillet, selon von Kalckstein), quand Eudes, voulant mater la révolte du comte de Flandre Baudouin, s'empara par la force de Laon et en fit mettre à mort le comte Waucher : on sait que, fidèle d'Eudes, l'évêque Dion refusa au comte la confession et la communion et qu'il en fut sévèrement blâmé par son métropolitain Foulques ; ne seraient-ce pas là des conditions particulièrement favorables pour disposer le roi à lui accorder une faveur exceptionnelle.


(Chrismon) In nomine sanctae et individuae Trinitatis. Odo clementia Dei rex. Si petitionibus servorum Dei assensum praebemus et eorum utilitatibus necessaria providemus moremque [2] praedecessorum nostrorum imperatorum ac regum sequentes, ut ea quae illis, divino amore instigati, conferimus deinceps rata permaneant, nostris confirmamus edictis, hoc nobis procul dubio ad aeternam beatitudinem capessendam et totius regni a Deo nobis [3] collati tutelam profuturum credimus et retributorem Dominum exinde in posterum habere confidimus. Igitur notum sit omnibus fidelibus sanctae Dei Ecclesiae et nostris, pręsentibus scilicet atque futuris, quia Dido, venerabilis episcopus sanctae Lugdunensis ecclesiae, ad nostram [4] regiae dignitatis accedens clementiam, humiliter expetiit ut, per pręceptum nostrae auctoritatis ei et successoribus ejus necnon et fratribus sibi a Deo commissis concedentes, firmaremus et firmantes [co]r[roboraremus ut] jam deinceps nullus regum, nulla [5] reginarum nullaque praepotens persona successorum nostrorum mansiones [et] domus ipsius ac successorum ejus necnon et claustrum fratrum intrare vel mansiones accipere sine licentia ipsius su[orum]que ullatenus praesumat. Cujus petitioni [6] assensum praebentes, pro remuneratione caelestis patriae, hoc praeceptum regalis celsitudinis nostrae tam ei quam suis fratribus fieri praecepimus, per quod delegantes sancimus et corroborantes firmamus ut mansiones et domus [7] praescripti episcopi ac claustrum suorum fratrum sub munitione ac defensione regalis dignitatis et auctoritatis nostrae nostrorumque successorum, ita prout ille deprecatus est, inrefragabiliter et inviolabiliter [8] omnimodis maneant, ut nec nos, nec aliquis successorum nostrorum, neque aliqua judiciaria potestas ibidem usquam vel unquam jam amplius in aeternum mansionem accipere vel manere sine consensu ipsius suorumque [9] pertemptet. Et ut haec auctoritas, quam ob Dei amorem et animae nostrae remedium statuimus atque roboravimus, firmiorem obtineat vigorem et deinceps inconvuls[a perdurare valeat, ma]nus nostrae conscriptione [10] eam subter firmavimus et de anulo nostro sigillari jussimus.

[11] Signum Odonis (Monogramma) gloriosissimi regis.

[12] Throannus notarius, ad vicem Eblonis, recognovit et subscripsit (Signum recognitionis et locus sigilli).