893, 15 octobre. — Saint-Denis.

Eudes, à la prière de son frère, le comte et marquis Robert, concède au fidèle royal Èbles (Ebalus) la propriété héréditaire d'un manse, jadis confisqué par suite de la négligence du possesseur, dans le comté de Tours.

Référence : Georges Tessier et Robert-Henri Bautier (éd.), Recueil des actes d'Eudes roi de France (888-898), Paris, 1967, no34.

A. Original. Parchemin autrefois scellé. Hauteur : 530 mm ; largeur : 376 mm en haut, 383 mm en bas. Bibliothèque nationale, ms. lat. 8837, fol. 67.

B. Copies tirées de la Pancarte noire de Saint-Martin de Tours, aujourd'hui perdue, du début du xiie siècle, fol. 44, v° : n° XXXIX : Copie du xviie siècle, par Besly, Bibliothèque nationale, Collection Dupuy, vol. 841, fol. 12 v°.

C. Copies tirées de la Pancarte noire de Saint-Martin de Tours, aujourd'hui perdue, du début du xiie siècle, fol. 44, v° : n° XXXIX : Copie du même, Ibid., fol. 79.

D. Copies tirées de la Pancarte noire de Saint-Martin de Tours, aujourd'hui perdue, du début du xiie siècle, fol. 44, v° : n° XXXIX : Copie du xviiie siècle, Bibliothèque nationale, ms. lat. 6007, fol. 81.

E. Copies tirées de la Pancarte noire de Saint-Martin de Tours, aujourd'hui perdue, du début du xiie siècle, fol. 44, v° : n° XXXIX : Copie du xviiie siècle, Bibliothèque nationale, Collection Dom Housseau, vol. 1, n° 142 (ancien 118).

F. Copies tirées de la Pancarte noire de Saint-Martin de Tours, aujourd'hui perdue, du début du xiie siècle, fol. 44, v° : n° XXXIX : Copie du xviiie siècle, collationnée par Percier, Archives nationales, K 186, n° 39.

G. Copies tirées de la Pancarte blanche, dite Pancarta alia, de Saint-Martin de Tours, aujourd'hui perdue, xiiie siècle, fol. 38 : Copie incomplète du xviie siècle, par Du Chesne, Bibliothèque nationale, Mélanges Colbert, vol. 46, fol. 52.

H. Copies tirées de la Pancarte blanche, dite Pancarta alia, de Saint-Martin de Tours, aujourd'hui perdue, xiiie siècle, fol. 38 : Copie incomplète de 1643, par Dom Lesueur, Bibliothèque nationale, ms. lat. 13898, fol. 78.

I. Copies tirées de la Pancarte blanche, dite Pancarta alia, de Saint-Martin de Tours, aujourd'hui perdue, xiiie siècle, fol. 38 : Copie du xviiie siècle, par Baluze, Bibliothèque nationale, Collection Baluze, vol. 76, fol. 70.

J. Copies tirées de la Pancarte blanche, dite Pancarta alia, de Saint-Martin de Tours, aujourd'hui perdue, xiiie siècle, fol. 38 : Copie du xviiie siècle, Bibliothèque nationale, Collection Dom Housseau, vol. 1, n° 141 (ancien 117).

a. Besly, Histoire des comtes de Poictou, p. 211.

b. Martène et Durand, Veterum scriptorum et monumentorum amplissima collectio, t. I, col. 241.

c. Labbe, Alliance chronologique, p. 491.

d. Recueil des historiens de la France, t. IX, p. 462, n° XXIV, d'après b.

Fac-similé : M. Prou, Manuel de paléographie, Album, III, 8 (partiel).

Fac-similé : Lot et Lauer, Diplomata Karolinorum, fasc. VI, pl. VI (Eudes, n° 3).

Indiqué : Bréquigny, Table chronologique, t. I, p. 349.

Indiqué : Böhmer, Regesta, n° 1891.

Indiqué : Mabille La pancarte noire de Saint-Martin de Tours, 1866, p. 84, n° XXXIX.

Indiqué : Favre, Eudes, p. 146, n. 2, p. 162, n. 4.

Ce diplôme soulève un problème délicat qui semble n'avoir été vu d'aucun des érudits qui l'ont copié, édité ou utilisé. Le roi concède un seul manse à son fidèle Èbles et à sa descendance. Or le dos porte une analyse d'apparence contemporaine, mais singulièrement différente : il ne s'agit plus en effet du seul fidèle Èbles, mais aussi de sa femme Emma (qui n'est point nommée dans l'acte), et il s'agit d'une villa et non plus d'un manse isolé. Cette villa serait Votnus, sur l'Indre, près de Pont-de-Ruan, entre La Loire et l'Indre, c'est-à-dire Vontes (cne de Monts, con de Montbazon, Indre-et-Loire), et non pas Vontes, cne d'Esvres, même canton, comme l'a cru Mabille. Mais si l'on peut fort bien s'expliquer qu'on précise que le territoire étendu d'une villa s'étale entre les deux fleuves de Loire et d'Indre, on le comprend beaucoup moins pour un manse de dimensions nécessairement restreintes ; car à Vontes, la distance à vol d'oiseau entre les deux fleuves dépasse 13 kilomètres, encore le Cher s'interpose-t-il entre eux. Une précision géographique, aussi vague, s'imposait-elle donc au destinataire, ou plus tard au moine chargé des archives ?

Or au premier examen on est frappé par une correction assez maladroite qui porte justement sur le nom de la localité concédée. Le scribe avait écrit distinctement Tarconnus. Une autre main, d'apparence contemporaine, a surchargé le T initial d'un U et le r suivant en t, puis la seconde syllabe, con, a été exponctuée par un entourage complet de points, tandis qu'au dessous de la ligne on réunissait à la dernière syllabe le jambage inutile du r transformé en t. Avec cette correction le manse de Tarconnus pouvait devenir la villa de Votnus, en accord avec le vocable porté au dos. Pour éviter toute contestation, la situation géographique de la localité était précisée au verso. Rapprochées des observations faites ci-dessus, l' « erreur » du notaire et l'ingénuité de la correction nous font éprouver quelque malaise. Nous trouvons précisément sur l'Indre, tout à côté de Vontes et à mi-distance de Pont-de-Ruan la localité d'Artannes qui pourrait correspondre au Tarconnus du scribe.

S'il en était ainsi, la falsification serait très ancienne, à peu près contemporaine du diplôme d'Eudes, car l'analyse dorsale, où se mêlent encore notes tironiennes et lettres capitales, ne saurait lui être de beaucoup postérieure. Or le 14 septembre 900 (Mabille, La pancarte noire de Saint-Martin de Tours, n° XXII, p. 72 ; cf. A. Salmon, Recueil des chroniques de Tours, p. 45) « noble homme » Gui, avec sa femme Emma et leur fils, le clerc Letaldus, reprenaient en précaire du comte-abbé Robert le domaine de Vontes (Votnus) qu'ils avaient donné à l'abbaye. L'original est aujourd'hui disparu, mais, aux termes de la Pancarte noire, Emma serait la veuve d'Èbles et son héritière, remariée à Gui. Mais le manse donné à Èbles, « à ses enfants et à toute sa postérité » aurait-il pu passer après son décès à sa veuve, et au second mari de celle-ci ? Quant au fils issu du second mariage, aurait-il été, moins de sept ans après le don fait par le roi au premier mari de sa mère, en âge d'être clerc et chanoine de Saint-Martin et d'intervenir dans son acte ? C'est parfaitement invraisemblable.

On peut donc émettre une hypothèse : le roi a donné à Èbles un manse à Artannes (Tarconnus). Quelques années après, Gui et Emma sa femme donnent à l'abbaye la villa de Vontes, contiguë au domaine d'Artannes et ils la reprennent en précaire. Un litige vient ultérieurement à surgir sur la légitimité des droits de Gui et d'Emma sur cette terre. On maquille alors le diplôme royal en corrigeant Tarconnus en Votnus, en précisant au dos la situation géographique de ce lieu et surtout en notant qu'Emma était femme du fidèle bénéficiaire, Èbles.


(Chrismon) In nomine Domini Dei aeterni et Salvatoris nostri Jhesu Xpisti. Odo clementia Dei rex. Si fidelium nostrorum petitionibus aurem celsitudinis [2] nostrae accomodamus, eorum animos nostris utilitatibus et rei publicę necessitatibus reddimus promptiores. Quocirca omnibus sanctae Dei Ecclesiae [3] fidelibus et nostris, presentibus scilicet atque futuris, notum esse volumus quoniam placuit serenitati nostrae, ad deprecationem Rotberti, [4] fratris nostri illustrisque comitis et marchionis, quendam alterum fidelem nostrum nomine Ebalum de rebus nostrae proprietatis honorare [5] et sublimare. Quae siquidem res sunt sitae in comitatu Turonicensi, vocabulo [Tarconnus] quae olim pro neglegentia cujusdam eas possi-[6]-dentis in fiscum sunt versae et est mansus unus. Has itaque predictas res cum mancipiis, vineis, campis, pratis, silvis, aquis [7] aquarumque decursibus, exitibus et regressibus, jam dicto et Ebalo et infantibus ejus omnique posteritati illius regio [8] more largimur et ad habendum concedimus, ea ratione ut abhinc ex his sicut ex reliquis suae proprietatis rebus [9] libero in faciendo potiatur arbitrio. Ut autem hujus nostrae largitionis concessio pleniorem, in Dei nomine, obtineat firmitatis [10] vigorem, manus nostrae roboratione eam subscribentes, anuli nostri impressione jussimus insigniri.

[11] Signum Odonis (Monogramma) gloriosissimi regis.

[12] Arnulfus notarius ad vicem Adalgarii archicancellarii reco[gno]vit et s. (Signum recognitionis).

[13] Data idibus octobris, anno sexto regnante Odone gloriosissimo rege. Actum apud Sanctum Dyonisium. In Dei nomine. Amen.


Localisation de l'acte

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