979, 8 juin-986, 2 mars.

Acte faux

Lothaire, à la demande de Litran, abbé du monastère de Saint-Éloi de Noyon, confirme audit monastère toutes les donations qui lui ont été faites jusqu'à ce jour, lui fait remise des droits de vinage et de tonlieu dans tout son royaume et lui accorde sa protection.

Référence : Louis Halphen et Henry D'Arbois de Jubainville (éd.), Recueil des actes de Lothaire et de Louis V rois de France (954-987), Paris, 1908, no66.

A. Original prétendu, perdu.

B. Copie du xviie s., par Dom Grenier, Bibliothèque nationale, Collection de Picardie, vol. 110, fol. 171, d'après A.

C. Copie du xviie s., dans une Histoire de l'abbaye royale de Saint-Éloy de Noyon, Bibliothèque nationale, ms. lat. 12669, fol. 106, d'après A.

D. Copie du xviie s., par A. Du Chesne, Bibliothèque nationale, Collection Du Chesne, vol. 57, fol. 25, d'après A.

E. Copie du xviiie s., collationnée par Porlier, conseiller-maître à la Chambre des Comptes de Paris, Archives nationales, K 185, n° 15, d'après A.

F. Copie authentique du 30 septembre 1680, Bibliothèque nationale, ms. lat. 12669, fol. 123 v°, d'après A.

G. Copie authentique de l'an 1681, Archives départementales de l'Oise, H 2128, d'après A.

a. Jacques Le Vasseur, Annales de l'église cathédrale de Noyon, t. I, p. 924.

b. Recueil des historiens de la France, t. IX, p. 654, n° xli, d'après a.

c. Colliette, Mémoires pour servir à l'histoire du Vermandois, t. I, p. 578, d'après a.

Indiqué : Mabillon, Annales ordinis S. Benedicti, XLVIII, 105, t. III, p. 663.

Indiqué : Bréquigny, Table chronologique, t. I, p. 466.


In nomine sancte et individue Trinitatis, Patris et Filii et Spiritus Sancti. Ego Lotharius, divina annuente clementia Francorum rex. Si piis petitionibus summo regi Xpisto in cenobiis militantium nostre exauditionis aurem acclinaverimus, quomodo sub tuitione regie nostre majestatis tranquille in ordine suo degant, et paci regni nostri et victorie et saluti nostre profuturum speramus. Scire igitur volumus cunctos regni nostri primates tam presentes quam futuros in perpetuum quod venerabilis Litrannus, pater cenobii sancti Eligii in Noviomensi suburbio siti, nostram adiit excellentiam, petens sibi regie libertatis decretum super omnibus que vel a nobis vel a progenitoribus nostris regibus sive a ceteris fidelibus ecclesie sue tradita sunt, fieri, quorum ista sunt nomina: Calneius cum ecclesia, Novavilla, Bucetrius, Cauren, Wasemias, Salinas. Ista pie memorie nepos noster Lyudulfus, Noviomorum episcopus, a genitoribus suis jure hereditario sibi relicta per manum nostram prefato cenobio, astantibus et assentientibus fratribus suis, nepotibus nostris, Alberto Viromandensi comite et Guidone, cum omni districtu et integritate totius libertatis contradiderat et nos precibus ipsorum pie faventes, utpote qui ea sorori mee, matri eorum, dederamus, concedimus et scripto nostro confirmavimus et presenti scripto confirmamus. Confirmamus et villas quas prefate civitatis Noviomi episcopus, cognatus noster Rodulfus, per manum patris nostri Ludovici pii regis cum omni integritate tocius libertatis eidem cenobio contulerat, Verleium scilicet, Mahericurtem, Dulliacum cum ecclesia, Beericurtem. Confirmamus et villas quas a progenitoribus nostris regibus, Clodoveo scilicet et Ludovico, sibi datas antiqua possessione eadem ecclesia tenuit, ut ea libertate in perpetuum possideat qua regalis celsitudo, que ipsi dedit, possederat. Horum hec sunt nomina: Carisiolas, Remimberticurtem, Manencurtem, Sigericurtem, Badincurt, Babodium cum molendino uno et coloniis et terris et pratis quamplurimis; in Apilleio census et terras; in villa Diva hospites cum vinea et pratis et camba et terris; in villa Andau hospites et terras; in villa Beemcurte hospites et terras; in villa Canectuncurt mansus unus; in villa Primpretia hospites, terras, silvas et prata; in villa Cellemmansi duo; in villa Gimenia mansus unus optimus; in villa Murmuliaco terre quamplurime cum uno manso et silva et pratis; in villa Curtedominica hospites cum tribus culturis et silva optima. Indulgemus etiam fratribus ejusdem ecclesie winagiam et theloneum in omni regno nostro super omnibus que vel de propriis sumptibus vendiderint vel in proprios usus emerint; suscipimus etiam eam in conductu et custodia nostra tam substantias ipsius quam et homines capitales ejus, qui, sicut ab antiquo in omni regno nostro sub libero responso sine alicujus advocati infestatione extiterunt, ita in perpetuum sub tutela nostra et succedentium nobis regum permaneant. Hec igitur ut rata et inconvulsa semper maneant et regia auctoritate precipio et scripto cum sigilli nostri impressione consigno et primatum nostrorum attestatione confirmo.

Ꞩ. Lotharii regis gloriosissimi.

(Monogramma.)

(Locus sigilli.)

Ꞩ. Alberti Viromandensis comitis. Ꞩ. Guidonis, fratris ejus.

Ego Arnulfus notarius subscripsi ad vicem domni Adalberonis archiepiscopi, summi cancellarii.

EXAMEN. La fausseté de ce diplôme se marque tant dans la forme que dans le fond. La forme trahit l'époque capétienne et les seuls détails qui en soient bons ont dû être empruntés au diplôme publié ci-dessus, n° LV. Quant au fond, ce diplôme contient une erreur singulière, puisque dans le prétendu original, dont nous avons des copies d'une fidélité au-dessus de tout soupçon, Albert de Vermandois était nommé à deux reprises, au lieu de Herbert, comme frère de l'évêque Liudulfus: une telle erreur n'eût pu se produire dans un acte authentique. On s'est étonné également de voir Liudulfus indiqué comme défunt dans un diplôme du roi Lothaire, puisque, a-t-on dit (voir, entre autres, Gallia christiana, t. IX, col. 993, et l'Histoire de Saint-Eloy de Noyon, Bibl. nat., ms. lat. 12669, fol. 107), on sait par d'autres documents qu'il lui survécut. Sur ce point nous serons moins affirmatifs: car les seuls textes cités dans ce sens sont, d'une part, une bulle de Jean XV, donnée en 988 à la requête de Liudulfus (Jaffé-Lœwenfeld, Regesta, n° 3829; éd. incomplète dans Lefranc, Histoire de Noyon, p. 180; copie à la Bibliothèque nationale, ms. lat. 12669, fol. 108) et, d'autre part, une notice de Gui le trésorier, écrite au milieu du xie siècle, et qui fait durer douze ans l'épiscopat de Liudulfus, soit de 977 à 989. Or la bulle de Jean XV est un faux manifeste et la notice de Gui, pleine d'erreurs incontestables en ce qui touche les autres évêques de Noyon, ne saurait faire foi; rien ne prouve donc que Liudulfus ait survécu à Lothaire et même aucun document postérieur au diplôme publié cidessus, n° LV, ne le mentionne. On ne peut, en effet, utiliser pour fixer la durée de sa vie une charte de l'évêque de Nevers, Natran, souscrite par lui, et donnée à Dijon en présence du roi Lothaire, l'an 32 du règne de ce roi et au mois de mars (éd. dans la Gallia christiana, t. XII, instrumenta, col. 319; la Gallia, t. IX, col. 992, cite cette charte pour reporter la mort de Liudulfus après 986) ou, du moins, on ne peut en tirer la preuve que Liudulfus ait vécu encore en mars 986, car tout montre dans le texte de cette charte que la date «anno .XXXII. regnante Lothario rege» qu'on y lit et que donnent toutes les copies (Bibliothèque de Lyon, ms. 127, fol. 129, copie du xviie s.; Bibliothèque nationale, ms. fr. nouv. acq. 7819. [Portefeuilles de Fontanieu, vol. 521], p. 375, copie du xviiie s., d'après l'original?) doit être corrigée en «anno .XXIIII. regnante Lothario rege», ce qui correspond à l'an 978 (cf. F. Lot, Les derniers Carolingiens, p. 92, n. 2), et, d'ailleurs, le titre de «vocatus episcopus» qu'y prend Liudulfus prouve qu'il n'était même pas encore consacré. Il n'y a peut-être donc pas impossibilité matérielle à ce qu'un diplôme ait été délivré par Lothaire à l'abbaye de Saint-Éloi de Noyon après la mort de l'évêque Liudulfus; mais il est certain que ce diplôme, s'il a existé, ne peut être celui que nous avons sous les yeux. Celui-ci a-t-il, au surplus, été fabriqué de toutes pièces? à quelle époque et dans quelles circonstances a-t-il été fait ou refait? Autant de questions qu'il serait utile de résoudre, mais que la pénurie des documents ne semble pas permettre jusqu'ici d'éclaircir.