878, [septembre, après le 12 et avant le 17]. — Troyes.
Louis le Bègue, renouvelant à la prière d'Ansemundus, abbé du monastère de Bañolas, sis dans le « pagus » de Besalú et dédié à saint Étienne (San Esteban de Bañolas alias Sant Esteve de Banyoles), un précepte délivré [par son père Charles le Chauve] en faveur de l'abbé Pierre, place sous la protection de l'immunité le monastère susdit avec les « cellae » qui en dépendent : la « cella » de Saint-Pierre à Mieras, avec le « villare » dit « Romzeutila » et une autre « cella » dédiée à saint Martin ; ailleurs, la « cella » de Saint-Julien et une autre dédiée à saint Michel ; à Santa Pau et à « Riudeazar », les « cellae » de Saint-Vincent et de Sainte-Marie ; à « Sisterianus », la maison de Sainte-Marie ; dans le comté de Perelada, les « cellae » de Saint-Jean, de « Pineta », de Saint-Pierre et Saint-Fructueux et, dans le « villaris » de « Fontanetus in valle Mala », les « cellae » de Saint-Silvestre et de Saint-Martin, accorde aux moines la liberté des élections abbatiales et interdit d'exiger d'eux ou de leurs hommes une prestation quelconque.
A. Original perdu.
a. España sagrada, t. XLV, p. 302, n° xxv, « ex auth. arch. ejusdem monasterii », soi-disant d'après A.
b. Monsalvatje, Noticias históricas, t. XI, Colección diplomática del condado di Besalú, p. 36, d'après a.
c. R. d'Abadal i de Vinyals, Catalunya carolíngia, vol. II, 1a part, p. 58, d'après a.
Indiqué : Villanueva, Viaje literario, t. XIV, p. 214.
Indiqué : Grat, Catalogue, n° 7.
Le précepte de Louis le Bègue pour le monastère de Bañolas porte la date suivante : « Data quarto kal. junii, indictione decima, anno primo regnante Ludovico gloriosissimo rege. Actum Trecas civitate ». Il aurait donc été délivré à Troyes le 29 mai 878, l'indiction retardant toutefois d'une unité (le chiffre de l'indiction pour l'année 878 est 11). La présence de Louis le Bègue à Troyes le 29 mai est exclue. Le roi avait célébré la fête de Pâques (23 mars) à Saint-Denis. Il y était encore le 30 mars (voir ci-dessus le n° 8) et un précepte du 2 avril est daté de Paris (n° 9). Il avait ensuite quitté la région parisienne pour les territoires entre Seine et Loire et était arrivé à Tours où il était tombé gravement malade (Annales Bertiniani, éd. Waitz, p. 140, et préceptes nos 11 à 14). Convalescent, il n'arriva à Troyes que pour le 1er septembre (Annales, p. 141). On écartera l'hypothèse d'une discordance entre le moment de l'acte juridique (Actum) et celui de la mise par écrit (Data), puisque le premier est nécessairement antérieur au second.
Il est attesté d'autre part, grâce à une notice de plaid publiée par Villanueva (Viaje literario, t. XIV, ap. 25) et commentée par R. d'Abadal (Catalunya carolíngia, vol. II, 1re partie, p. 41-43), qu'Ansemundus, abbé de Bañolas, s'est rendu à Troyes, à l'occasion du concile tenu dans cette ville au début de septembre 878, pour y affirmer ses droits sur les biens que lui disputaient l'abbé et les moines du monastère de Saint-Polycarpe. Le roi lui donna raison et ordonna l'expédition d'un précepte en sa faveur, « tunc precepit mihi facere isto precepto ».
Le problème paraît d'autant plus insoluble que le premier éditeur du diplôme prétend l'avoir publié d'après l'original, auquel cas il faudrait imputer à son inexpérience ou à celle de son copiste la disposition fautive de la souscription royale, les cacographies de la souscription de chancellerie (Ruidbaldus pour Wigbaldus et Bertioni pour Gauzleni) et la mauvaise transcription des données chronologiques de la date. Cette accumulation d'erreurs étant peu probable, une hypothèse se présente à l'esprit. Le protocole initial du précepte de Louis le Bègue reproduit exactement celui du précepte de Charles le Chauve du 21 février 866 (Recueil des actes de Charles le Chauve, t. II, p. 138, n° 289), alors qu'on attendait les formules habituelles : « In nomine Domini Dei aeterni et Salvatoris nostri Jhesu Christi. Hludowicus misericordia Dei rex ». Les deux textes continuent à se superposer, sauf quelques intercalations qui se retrouvent dans un précepte de Charles le Simple du 9 avril 916 (éd. Lauer, p. 190, n° lxxxv). Peut-être le précepte de Louis le Bègue dont l'original avait été plus ou moins détérioré a-t-il été reconstitué à l'aide des deux préceptes entre lesquels il vient s'insérer et l'éditeur de l'España sagrada s'est-il trouvé en présence d'un pseudo-original incorrectement daté. Nous avons inséré ce diplôme dans la série chronologique après le 12 septembre, parce que le précepte expédié en ce jour (n° 20) porte encore la souscription de Vulfardus, et avant le 17 du même mois, puisque le roi avait à cette date quitté Troyes (n° 24).
F. Grat a supposé l'existence de deux préceptes de Louis le Bègue, dont l'un aurait été perdu (Catalogue, n° 26). En effet le diplôme fait allusion à un « auctoritatis nostrae praeceptum dudum a nobis antecessori ejus Petro venerabili abbati factum ». Il n'y a là vraisemblablement qu'une adaptation fort gauche des termes du précepte de Charles le Chauve. Il semble bien d'autre part qu'Ansemundus était déjà abbé de Bañolas en 870 (d'Abadal, op. cit., p. 41).
Texte de a :
In nomine sanctae et individuae Trinitatis. Ludovicus Dei gratia rex. Si erga loca divinis culti[b]us mancipata Deoque in eisdem famulantibus beneficia opportuna largimur, [praem]ium remunerationis eternae ob id [nobis] rependi non diffidimus, quin et etiam ad diuturnam felicemque regni nostri id ipsum stabilitatem pertinere nullatenus dubitamus. Itaque notum sit omnibus sanctae Dei Ecclesiae fidelibus et nostris, presentibus atque futuris, quia venerabilis vir Ansemundus, abbas monasterii quod dicitur Balniolas, quod est situm in pago Bisuldunensi, constructum scilicet in honore sancti Stephani, protomartiris Christi, adiens serenitatis nostrae fastigia, obtulit auctoritatis nostrae praeceptum dudum a nobis antecessori ejus Petro venerabili abbati factum, in quo continebatur qualiter idem monasterium cum monachis inibi Deo famulantibus o[m]nibusque ei pertinentibus sub immunitatis nostrae munimine pleniter susceperimus, sicut quondam di[vae] recordationis genitor noster Carolus gloriosus rex illud sui praecepti auctoritate sub sua immunitate suscepisse dignoscitur, petiitque idem Ansemundus venerabilis abbas ut memoratam auctoritatem renovantes cum ac monachis sibi commissis predictumque monasterium et cellas sibi pertinentes, id est in loco qui dicitur Milliaris cella[m] sancti Petri cum omni sua integritate sicut in illorum judicio resonat, et ipsum villare qui dicitur Romzeutila et cella sancti Martini ad sua omnia, et in alio loco cella sancti Juliani, sancti Michaelis, et in Sancta Pace cellas sancti Vincentii cum omnibus terminis suis, et in Riudeazar cella sanctae Mariae cum terminis suis, et in locum qui dicitur Sisterianus domum sanctae Mariae cum omnibus sibi pertinentibus, et in comitatu Petralatense cellam quae vocatur Sanctus Joannes, cum alia cella quae vocatur Pineta, et cella sancti Petri et sancti Fructuosi, cum omnibus sibi pertinentibus, et in Valle Mala, in villare quae dicitur Fontanetus, cella sancti Silvestri et alia cella sancti Martini cum vineas quae ibi attinere videntur, cum omnibus appenditiis suis, et cum cunctis aliis rebus ad praedictum monasterium pertinentibus, sicut dictum est, sub nostrae immunitatis defensione reciperemus. Cujus saluberrimis precibus libenter faventes, idem monasterium cum monachis et cunctis sibi pertinentibus rebus, [res quoque] quas eidem loco pro animae nostrae remedio largiti sumus, sub immunitatis nostrae tuition[e] suscepimus. Precipientes ergo jubemus ut nullus judex publicus vel quislibet ex judiciaria potestate in praedictum monasterium vel cellulas aut alia loca sibi pertinentia atque subjecta seu agros ac reliquas possessiones, in quibus consistant locis, ad causas judiciario more audiendas, vel freda seu mansiones aut paraverendos sive paratas exigendas, vel fidejussores tollendos aut homines ipsius monasterii distringendos, seu aliquas redibitiones aut [functiones] aut illicitas occasiones requirendas, ullo unquam tempore ingredi audeat nec ea quae supra memorata sunt exigere presumat, sed cum omnibus locis vel cellis saepe memorato monasterio subjectis, in quibuscumque consistant locis, quas moderno tempore tam ex apprisione quam ex eremo habent tractas, vel deinceps excollere potuerint, cum aliis quibuscumque possessionibus, quibus praesenti tempore ejusdem abba juste rationabiliterque dominari videtur, simul etiam cum his quas divina pietas per suos quosque fideles ipsi sacratissimo loco augeri voluerint, liceat memorato abbati suisque successoribus fratribus in eodem caenobio degentibus quiete vivere, et easdem res sine cujuspiam contradictione aut imminoratione tenere et possidere et pro nobis ac stabilitate regni nostri Domini misericordiam libenter exorare ; et quandocumque divina pietas eundem abbatem ab hac luce susceperit, quamdiu ipsi monachi inter se tales eligere potuerint, qui ipsam congregationem secundum regulam sancti Benedicti regere valeant, per nostrum concessum ac jussionem licentiam habeant ex semetipsis eligendi abbates. Nolumus praeterea ut ab ipsis vel ab eorum hominibus aliquid telonei, neque pascuaticum, nec mansionaticum aut aliquas redibitiones exigatur. Et ut haec auctoritas nostra presentibus futurisque temporibus inconvulsa permaneat, manu propia subter adfirmavimus et de annulo nostro sigillari jussimus.
Signum Ludovici gloriosissimi regis.
Ruidbaldus notarius ad vice Bertioni recognovit et sub.
Data <quarto kal. junii>, indictione decima, anno primo regnante Ludovico gloriosissimo rege. Actum Trecas civitate. In Dei nomine feliciter. Amen.