877, 30 novembre. — Compiègne.

Louis le Bègue s'engage vis-à-vis du clergé à se conformer aux règles canoniques traditionnelles et vis-à-vis du peuple à observer, appuyé sur le conseil de ses fidèles, les lois et règlements de ses prédécesseurs.

Référence : Félix Grat, Jacques de Font-Réaulx, Georges Tessier et Robert-Henri Bautier (éd.), Recueil des Actes de Louis II le Bègue, Louis III et Carloman II, rois de France (877-884), Paris, 1978, no3.

« Le texte de l'engagement de Louis, de sa professio, souscrit de sa propre main et remis par lui aux évêques à l'occasion de son sacre et de son couronnement, célébrés le 8 décembre 877, ne nous est connu que par les Annales Bertiniani. Après avoir brièvement raconté les tractations qui précédèrent le sacre, Hincmar ajoute qu'au cours de la cérémonie et, semble-t-il, après le sacre lui-même et l'imposition de la couronne, les évêques se recommandèrent au roi (commendatio episcoporum) et firent profession de leur fidélité (professio episcoporum). Ensuite les abbés, les grands laïques et les vassaux royaux se recommandèrent au souverain et lui promirent fidélité sous la foi du serment.

En ayant ainsi terminé avec l'annale de 877, Hincmar a recopié ou fait recopier en appendice et à titre de pièces justificatives les documents suivants : 1° une petitio des évêques en vue d'obtenir du roi le renouvellement des engagements inscrits dans l'article premier du capitulaire de Quierzy ; 2° la promissio consécutive du roi ; 3° le texte du capitulaire visé ; 3° la commendatio episcoporum ; 4° la professio des mêmes évêques ; 5° la professio de Louis II dont on lira plus loin le texte.

Le capitulaire de Quierzy mis à part, les éditeurs de ces documents et les auteurs qui ont disserté à leur sujet ne sont pas d'accord sur leur chronologie. Nous croyons qu'il convient de s'en rapporter aux indications fournies par Hincmar lui-même. Aucun doute n'est possible sur la commendatio et la professio episcoporum, qui se placent tout naturellement le 8 décembre, après le sacre, “quando benedixerunt [episcopi] Hludowicum”. D'autre part, nous ne voyons pas de raison valable pour supposer avec Léon Levillain (Annales Bertiniani, éd. Grat, p. 221, n. 1) qu'Hincmar aurait commis un lapsus en datant du 30 novembre la professio Hludowici, “et istam ipsam donationis scripturam manu sua eis [episcopis] dedit in Compendio anno Incarnationis dominicae DCCCLXXVII, II kalendas decembris”, et pour corriger la leçon II kalendas en II idus. Au contraire, cette précision chronologique nous apparaît intentionnelle, Hincmar ayant voulu souligner que la professio Hludowici n'avait pas été remise aux évêques le jour du couronnement, mais qu'elle avait marqué la fin des tractations de Louis II avec les grands ecclésiastiques, coïncidant avec la venue de Richilde à Compiègne pour apporter à son beau-fils les insignes de la souveraineté. Comme Hincmar rattache la professio à la petitio des évêques, “ad suprascriptam vero episcoporum petitionem haec quae sequuntur rex Hludowicus professus est episcopis...”, on serait tenté de conclure que la petitio lui est antérieure. Hincmar, il est vrai, introduit le texte de celle-ci par les mots : “Quando Hludowicus rex... fuit coronatus in Compendio, hoc petierunt episcopi apud ipsum...”. Nous tenons pour invraisemblable que les évêques aient attendu le jour du couronnement et du sacre pour présenter leurs revendications. Ils ne s'étaient ralliés à Louis le Bègue qu'après avoir reçu quelques jours auparavant les apaisements qu'ils réclamaient. Aussi interprétons-nous largement la référence chronologique donnée par Hincmar, qui situe simplement la petitio des évêques dans la perspective du couronnement ».

Nous avons tenu à reproduire ici dans son intégralité la notice préparée par G. Tessier. Nous croyons devoir y ajouter quelques observations. Si la promissio fut bien rédigée dès le 30 novembre (et nous en voyons une confirmation dans le fait que ce même jour l'impératrice Richilde, concrétisant l'accord intervenu entre les grands et le roi remit à celui-ci les insignes de la royauté et l'acte par lequel Charles le Chauve lui avait fait dévolution du royaume), ce n'est qu'au cours de la cérémonie même du sacre, le 8 décembre, et sans doute au début, avant les bénédictions, que les évêques firent leur petitio officielle au roi et que Louis, en réponse, leur lut sa promissio et déposa sur l'autel l'écrit qui la consignait. C'est là ce qui explique, en dépit de la différence de date, la formule employée par Hincmar dans les Annales Bertiniani et que nous avons déjà rapportée : « Quand le roi Louis fut couronné à Compiègne, les évêques lui firent cette petitio... ; après la petitio des évêques, le roi fit la promissio suivante... ». C'est, en tout cas, la conclusion qui s'impose à la lecture de la lettre de Hincmar à Louis le Bègue : « Rappelez-vous de votre professio que le jour de votre consécration vous avez promise... et que vous avez souscrite de votre propre main et offerte au Seigneur sur l'autel devant tous les évêques qui étaient présents ».

Le texte de la promissio et de la professio de Louis et celui des diverses interventions épiscopales, petitio, commendatio, professio ont été publiés non seulement par les divers éditeurs des Annales Bertiniani, mais encore par Baluze, Capitularia (éd. de 1680), t. II, col. 271, par G.H. Pertz, Leges, t. I, p. 542, et par Boretius et Krause, Capitularia, t. II, p. 363, n° 283, « Capitula electionis Hludowici Balbi Compendii facta ». Sur la nature et la portée de l'engagement de Louis le Bègue on consultera entre autres P.E. Schramm, Der König von Frankreich, 2e éd., 1960, p. 53 et suiv. et M. David, Le serment du sacre du ixe au xve siècle, p. 97-122 ; cf. C. Brühl, Fränkisches Krönungsbrauch und das Problem der Festkrönungen, dans Historische Zeistchrift, 194, 1962, p. 265-326.


Texte des Annales Bertiniani, éd. F. Grat, p. 221 :

Ego Hludowicus, misericordia domini Dei nostri et electione populi rex constitutus, promitto, teste Ecclesia Dei, omnibus ordinibus, episcoporum videlicet, sacerdotum, monachorum, canonicorum atque sanctimonialium, regulas a patribus conscriptas et apostolicis adtestationibus roboratas ex hoc et in futurum tempus me illis ex integro servaturum. Polliceor etiam me servaturum leges et statuta populo qui mihi ad regendum misericordia Dei committitur, pro communi consilio fidelium nostrorum, secundum quod predecessores mei imperatores et reges gestis inseruerunt et omnino inviolabiliter tenenda et observanda decreverunt. Ego igitur Hludowicus rectitudinis et justitiae amore hanc spontaneam promissionem meam relegens, manu propria firmavi.


Localisation de l'acte

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