1120 [18 avril-2 août]. — S.l. [Saint-Denis].

Louis VI, s'étant rendu en hâte à la basilique de Saint-Denis en compagnie de la reine, sur le conseil des membres du palais, restitue, du consentement de son fils Philippe et en présence du légat pontifical Conon [de Préneste], la couronne de son père à ladite abbaye, puisque le droit et la coutume veulent que les insignes des rois de France défunts soient apportés à saint Denis, guide et protecteur du royaume ; afin de compenser le retard de cette cérémonie, il rend à Saint-Denis — pour le salut de son âme, la protection divine des siens et la bonne administration du royaume — l'église de Cergy avec ses dîmes et ses dépendances ; en outre, il lui accorde et confirme toute la voirie sur la « curia » et les maisons appartenant en propre à l'abbaye en ce lieu, qui bénéficieront d'une franchise perpétuelle.

Référence : Jean Dufour et Robert-Henri Bautier (éd.), Recueil des actes de Louis VI roi de France (1108-1137). Vol. 1 : Actes antérieurs à l'avènement et 1108-1125, Paris, 1992, no163.

A. Original. Parchemin scellé d'un sceau plaqué. Hauteur 625 mm ; largeur 450 mm. Archives nationales, K 21C, n° 16 (Musée, AE II, 1706).

B. Copie de la fin du xiiiie siècle, dans le Cartulaire blanc de Saint-Denis (t. I), Archives nationales, LL 1157, p. 625, sous le n° : « De Cergiaca (sic) II » et la rubrique : « De ecclesia de Cergiaco et de rebus pertinentibus ad eam Ludovici Senioris, regis Francorum ».

C. Copie du début du xive siècle, dans le cartulaire « de Thou », Bibliothèque nationale, lat. 5415, p. 115, d'après B.

D. Copie du xviie siècle, par A. Duchesne, Bibliothèque nationale, Collection Duchesne, vol. 56, fol. 338, d'après B.

E. Copie du xviie siècle, par A. Duchesne, Bibliothèque nationale, Collection Baluze, vol. 55, fol. 368v, d'après B.

F. Copie partielle du xviie siècle, par Sirmond, Bibliothèque nationale, Collection Baluze, vol. 139, p. 63, sans indication de source.

G. Copie du xviie siècle, pour Gaignières, Bibliothèque nationale, lat. 17111, p. 59, d'après A.

H. Copie du xviie siècle, Archives nationales, LL 1160, p. 124, d'après C.

I. Copie du xviie siècle, Bibliothèque nationale, fr. 16177, fol. 137, d'après B.

J. Copie du xviie siècle, Archives nationales, S 2318A, n° 4, sans indication de source.

K. Copie de la fin du xviie siècle, Archives municipales de Saint-Denis, GG 11, p. 1019, d'après B.

L. Copie de 1721, par Bouhier, Bibliothèque nationale, lat. 17110, fol. 58, d'après C.

M. Copie incomplète du xviiie siècle, par le président Lévrier, Bibliothèque nationale, Collection du Vexin, vol. 8, p. 303, d'après A.

N. Copie partielle du xviiie siècle, par le président Lévrier, Bibliothèque nationale, Collection du Vexin, vol. 12, fol. 71v, avec référence à a et f.

O. Copie du 16 septembre 1746, par Noblet, « écuyer, conseiller, secrétaire du roy, maison, couronne de France et de ses finances, greffier en chef de la Chambre des comptes », Archives nationales, K 21, n° 16b, d'après A.

P. Copie du 23 juin 1762, collationnée par Pierre-Claude de Lizy, notaire à Saint-Denis, Archives départementales des Yvelines, D 585, n° 6, d'après A.

a. J. Doublet, Histoire de l'abbaye de S. Denys en France, Paris, 1625, p. 849, d'après A.

b. A. Duchesne, Histoire généalogique de la maison de Dreux, Paris, 1631, preuves, p. 220, d'après B.

c. A. Galland, Du franc-alleu et origine des droicts seigneuriaux, Paris, 1637, p. 293, d'après B (éd. partielle).

d. Auteuil, Histoire des ministres d'Estat qui ont servi sous les roys de France de la troisième lignée, Paris, 1642, p. 188, d'après B (éd. partielle).

e. Ph. Labbe, Alliance chronologique, t. II, p. 604, sans indication de source (éd. partielle).

f. M. Félibien, Histoire de l'abbaye royale de Saint-Denis en France, Paris, 1706, preuves, p. xcii, n° CXXII, d'après A.

g. Gallia christiana, t. VII, instr., col. 49, n° LVII, sans indication de source (éd. partielle).

h. J. Tardif, Monuments historiques, n° 379, p. 213, d'après A.

Indiqué : F.-J. Chasles, Dictionnaire universel, chronologique et historique de justice, police et finances distribué par ordre de matières, contenant tous édits, déclarations du roy, lettres patentes... rendus depuis l'année 600 jusques et compris 1720..., Paris, 1725, t. I, p. 4.

Indiqué : Bréquigny, Table chronologique, t. II, p. 490.

Indiqué : Ordonnances des rois de France, vol. supplémentaire, p. 200.

Indiqué : L. Delisle, Sur la date de l'association de Philippe, fils de Louis le Gros, au gouvernement du royaume, dans Journal des savants, 1898, p. 738.

Indiqué : F. Lot, Études sur les légendes épiques françaises. III : Encore « Gormond et Isembart », dans Romania, t. LIII, 1927, p. 340.

Indiqué : Th. Schieffer, Die päpstlichen Legaten in Frankreich vom Vertrage von Meersen (870) bis zum Schisma von 1130, Berlin, 1935, p. 209 et n. 76 ; p. 210, n. 86.

Indiqué : R. Barroux, L'anniversaire de la mort de Dagobert à Saint-Denis au XIIe siècle, dans Bulletin philologique et historique du Comité des travaux historiques et scientifiques, 1942-1943, p. 140.

Indiqué : R. Barroux, L'abbé Suger et la vassalité du Vexin en 1124, dans Le Moyen Age, t. LXIV, 1958, p. 21-22.

Indiqué : C. Van de Kieft, Deux diplômes faux de Charlemagne pour Saint-Denis du XIIe siècle, dans Le Moyen Age, t. LXIV, 1958, p. 420.

Indiqué : F. Gasparri, L'écriture des actes de Louis VI, n° 39.

Indiqué : D. Gaborit-Chopin, Les couronnes du sacre des rois et des reines au trésor de Saint-Denis, dans Bulletin monumental, t. CXXXIII, 1975, p. 165 et n. 7 (sous la date de 1108 !).

Indiqué : É. Bournazel, Le gouvernement capétien, p. 131, n. 4 et 6 ; p. 133, n. 25 ; p. 145, n. 28 ; p. 172, n. 25.

Indiqué : A. Erlande-Brandenburg, Le roi est mort. Étude sur les funérailles, les sépultures et les tombeaux des rois de France jusqu'à la fin du XIIIe siècle, Genève-Paris, 1975, p. 84-85.

Indiqué : G.M. Spiegel, The Chronicle tradition of Saint-Denis : a survey, Brookline-Leyden, 1978, p. 31.

Indiqué : R.-H. Bautier, Quand et comment Paris devint capitale, dans Bulletin de la Société de l'histoire de Paris et de l'Île-de-France, 105e année, 1978 [1979], p. 38, n. 118.

Indiqué : M. Du Pouget, La légende carolingienne à Saint-Denis : la donation de Charlemagne au retour de Roncevaux, dans Bulletin de la Société des sciences, lettres et arts de Bayonne, n° 135, 1979, p. 58.

Indiqué : A.W. Lewis, Royal succession in Capetian France..., Cambridge (Mass.), 1981, p. 247, n. 48.

Indiqué : T. Waldman, Abbot Suger and the nuns of Argenteuil, dans Traditio, vol. XLI, 1985, p. 263.

Indiqué : A.W. Lewis, Suger's views on kingship, dans Abbot Suger and Saint-Denis. A Symposium [1981], New York, 1986, p. 53, n. 21.

Indiqué : B. Bedos-Rezak, Suger and the symbolism of royal power : the seal of Louis VII, ibid., p. 101, n. 26.

Indiqué : A. Lombard-Jourdan, Les foires de l'abbaye de Saint-Denis..., dans Bibliothèque de l'École des chartes, t. 145, 1987, p. 299, n. 1.

Cet acte se divise en deux parties bien distinctes. La première, due à une main typiquement sandionysienne, est de toute évidence l'œuvre du destinataire, comme le montre l'emploi de l'adresse générale (déjà présente dans les nos 135 et 142) et d'une formule de corroboration inaccoutumée. La seconde, due à un scribe de la chancellerie royale qui, par manque de place, n'a pas pu respecter la justification délimitée par la main A, est composée des formules finales, avec, en particulier, la formule de corroboration habituelle (qui fait doublon avec celle de Saint-Denis) et la souscription de chancellerie ; suit l'indication — unique pour l'ensemble des actes de Louis VI — du nom des destinataires : « Adamo abbati Beati Dyonisii et universe ejusdem monasterii congregationi » encadrant le monogramme, le tout apposé par une main sandionysienne.

Passons au contenu. Nous avons affaire ici au premier des trois diplômes importants concédés par Louis VI à Saint-Denis (les deux autres étant les nos 220 et 281), très probablement déjà à la demande expresse de Suger, présent dans l'entourage royal depuis 1118. Le célèbre personnage, désireux de contrebalancer le don fait peu auparavant de la relique de la vraie Croix à Notre-Dame de Paris, réclame la couronne de Philippe Ier, sous prétexte que la coutume et le droit font de son église le dépositaire des insignes royaux des rois défunts (« quoniam jure et consuetudine regum Francorum demigrantium insignia regni ipsi sancto martyri [Dyonisio], tanquam duci et protectori suo, referuntur »). Suger veut imposer Saint-Denis comme caput regni, terme qui apparaîtra dans le n° 220, et comme nécropole officielle des rois de France, ce qu'il obtiendra avec le n° 281, réagissant ainsi contre l'inhumation de Philippe Ier à Saint-Benoît-sur-Loire. Pour aboutir à ses fins, il lui semble bien vite que la présentation d'actes anciens était indispensable, ce qui conduisit la communauté sandionysienne à forger un grand nombre de préceptes mérovingiens ou carolingiens dans les années suivantes.

Le passage concernant la restitution de la couronne est mentionné par Suger dans la Vita Ludovici Grossi regis à la date inexacte de 1124 :

et celui ayant trait à la cession de l'église de Cergy avec ses droits dans son De rebus in administratione sua gestis :

Cet acte fut vidimé par saint Louis en mars 1270 (n. st.) à Sens.

A son propos, cf. aussi infra, la note critique du n° 220.


Ludovicus, Dei gratia rex Francorum, archiepiscopis, episcopis, ducibus, comitibus et universis regni nostri proceribus. Quia Dei omnipotentis larga miseratione [2] regnum nostrum stare et nunquam terrenum, nisi per cęleste, veraciter proficere manifeste cognovimus, summa sollicitudine, continua cura, in-[3]-standum nobis est circa ecclesiarum Dei cultum, ex regie majestatis munificentia, benignitatis opera impendere, terrenis cęlestia felici com-[4]-mutatione commercari, ut per hęc regni nostri amministratio temporaliter fiat gloriosa et, « istis deficientibus, illa nos recipiant in ęterna ta-[5]-bernacula ». Nos igitur cum et aliis longe lateque ęcclesiis, tum precipue nobili monasterio ter beati Dyonisii sociorumque ejus, propen-[6]-sius attendentes, eo primum affectu quo totum regnum nostrum sorte apostolatus suscipiens Domino Deo proprii sanguinis effusione resti-[7]-tuit, eo etiam quo ei antecessores nostri benivolentia et familiaritate confoederati sunt, qui cum multa ei contulerint, mul-[8]-to majora per ipsum receperunt. Communicato cum palatinis nostris consilio, ad ipsam sanctissimorum martirum basilicam, cum conjuge nostra, acce-[9]-leravimus et, presente venerabili episcopo donno Conone, Sanctę Sedis apostolicę legato, quoniam jure et consuetudine regum Francorum demigrantium [10] insignia regni ipsi sancto martiri, tanquam duci et protectori suo, referuntur, coronam patris nostri ei reddidimus, pro dilatione redditio-[11]-nis satisfecimus et, tam pro salute animę nostrę quam pro regni amministratione, conjugis et prolis conservatione, ęcclesiam de Cirgiaco, sicut libere [12] possidebamus, cum decimis et omnibus ad ęcclesiam pertinentibus, ęcclesię restituendo, ipsis sanctis martiribus contulimus ; curię etiam et propriis domibus [13] beatorum martirum in eadem curia perennem indulgemus libertatem, vicariam omnimodam in curia ipsa et curię domibus conferimus et con-[14]-ferendo confirmamus, per hanc nostrę auctoritatis paginam sancientes. Si quis autem hoc preceptum largitionis nostrę violare temptaverit, iram Dei [15] et offensam donni Dyonisii incurrat reusque nostrę majestatis judicetur. Ut igitur hoc decretum a nobis promulgatum pleniorem obti-[16]-neat vigorem, nostra manu subter apposito signo roboravimus atque fidelibus nostris presentibus roborandum tradidimus nostręque imaginis si-[17]-gillo insuper assignari jussimus. Quod ne valeat oblivione deleri, scripto commendavimus et, ne possit a posteris infringi, sigilli nostri actoritate [18] et nominis nostri karactere subterfirmavimus. Actum publice anno incarnati Verbi MCXX, regni nostri XII, Adelaidis autem regine VI, [19] concedente Philippo filio nostro. Astantibus in palatio nostro quorum nomina subtitulata sunt et signa. Ꞩ Stephani dapiferi. Ꞩ Guisle-[20]-berti buticularii. Ꞩ Hugonis constabularii. Ꞩ Guidonis chamerarii. Data per manum Stephani cancellarii. Ada-(Monogramma)-mo abbati Beati Dyo-[21]-nisii et universe ejusdem monasterii congregationi.

(Sigillum placatum)


Localisation de l'acte

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