924, 6 avril. — Chalon-sur-Saône.
Raoul confirme au monastère de Saint-Martin d'Autun, à la requête de l'abbé Aimon et sur la prière de sa propre femme Emma, les biens mentionnés dans les préceptes de ses prédécesseurs, à savoir : en Autunois, la « villa » de La Celle[-en-Morvan], Thil[-sur-Arroux], Bragny[-en-Charollais] avec « Fabricae » et Maltat, « Vitrariae », Neuvy ; en Chaunois, Chenoves et Granges ; en Auxois, Cussey ; en Avalois, Girolles et « Tarridum » ; en Nivernais, Beunas, Chasseigne, Saint-Saulge, Le Chambon ; en Berry, Colombiers, Allouis et « Porcariorum » ; en Viennois, Albon ; en Provence, dans le comté de Fréjus, Bargemon ; dans le comté de Vaison, Bésignan (Besentianum) et Mollans (Muleriacum) ; en Orléanais, la « villa » de « Pinus » et Rouvres[-Saint-Jean] ; également en Autunois, Montorsin, le lac au pied de Thil-sur-Arroux (en vue de Charbonnat), dont une rive appartenait déjà à Saint-Martin et dont l'autre, du côté de Charbonnat, avait été concédée par sa femme, avec son consentement, en aumône à Saint-Martin ; enfin la chapelle des Saints-Gémeaux, hors les murs d'Autun, obtenue du fidèle Bérenger qui la tenait du roi en bénéfice et qui, avec l'accord de celui-ci, la donna à Saint-Martin à titre de précaire. Tous ces biens sont concédés en bénéfice viager audit abbé Aimon, auquel, sur sa demande, le roi désigne comme successeur Hugues ; à la mort de ce dernier, les moines de Saint-Martin d'Autun reprendront la libre élection de leur abbé. Le roi renouvelle, de plus, à l'abbaye le privilège de l'immunité.
A. Original perdu, jadis « scellé d'un scel de cire blanche » (d'après C).
B. Vidimus du 23 octobre 1521, collationné apud Sanctum Salvium [Saint-Saulge] par Berraud et Debeuf, Archives de Saône-et-Loire, 3 H non catalogué, layette intitulée « Diplômes et bulles », travée 487, d'après A.
C. Copie du 29 décembre 1551, par « Arthur Lempereur, sergent royal au bailliage d'Ostun... », Archives de Saône-et-Loire, 3 H non catalogué, layette intitulée « Diplômes et bulles », travée 487, d'après A.
D. Copie du xviiie siècle, par Dom Aubrée, Bibliothèque nationale, Collection de Bourgogne, vol. 111, fol. 27, d'après le « Chartrier de Saint-Martin d'Autun ».
E. Copie de la seconde moitié du xviie siècle, par [Dom Auzout] dans un cartulaire historique de Saint-Martin d'Autun, fait « pour le Révérend Père Dom Jean Mabillon », Archives de Saône-et-Loire, 3 H non catalogué, fol. VIIIxxII, layette intitulée « Inventaire, cartulaire du xviie siècle », travée 487, sans indication de source.
a. Mabillon, De re diplomatica, p. 564, « ex autographo a D. Auzout descriptum ».
b. J.-G. Bulliot, Essai historique sur l'abbaye de Saint-Martin d'Autun, t. II, p. 24, n° 10, sans indication de source.
c. Gallia christiana, t. IV, instrumenta, col. 71, n° XXXII, d'après a.
d. Recueil des historiens de la France, t. IX, p. 563, n° II, d'après a.
Indiqué : Georgisch, Regesta, t. I, p. 201.
Indiqué : Bréquigny, Table chronologique, t. I, p. 385.
Indiqué : Böhmer, Regesta, n° 1981.
Indiqué : W. Lippert, König Rudolf, p. 108, n° 2.
Indiqué : Ph. Lauer, Robert Ier et Raoul de Bourgogne, p. 30.
La rédaction de ce diplôme fait allusion à des actes antérieurs de rois ou d'empereurs, auxquels il n'emprunte, à vrai dire, que peu d'éléments ; il reprend quelques formules de deux donations de Charles le Chauve pour Saint-Martin d'Autun, la première du 16 mars 875, la seconde du 11 août 877, ainsi que des diplômes de Charles le Gros du 16 juin 885 et de Charles le Simple du 26 juin 900. D'autre part, par des diplômes aujourd'hui perdus, mais mentionnés expressément dans ceux de Charles le Gros et de Charles le Simple, Louis le Bègue et Carloman avaient renouvelé l'immunité du monastère.
Les divers érudits ayant transcrit le texte ont mal lu la date ; l'original portait, selon toute vraisemblance, VIII idus april. ; comme les deux barres du V n'étaient probablement pas bien jointes à leur base, ils ont lu parfois IIIII idus april. et transcrit quinto idus aprilis ; d'autres ont mal compté les jambages et ont écrit quanto idus aprilis.
L'expression ex capite abbatiae indique que ce sont les biens de la mense abbatiale que Raoul confirme ici. Il faut noter, en outre, que l'acte comporte deux parties ; tout d'abord il renouvelle les donations antérieures faites à Saint-Martin d'Autun ; d'autre part, il confirme de nouvelles possessions de cette abbaye (Montorsin, une rive du lac au pied de Thil-sur-Arroux, donnée en aumône par la reine Emma, peut-être avant l'avènement de Raoul, la chapelle des Saints-Gémeaux).
Nous imprimons indistinctement en petit texte les passages empruntés aux diplômes de Charles le Chauve du 11 août 877, de Charles le Gros du 16 juin 885 et de Charles le Simple du 26 juin 900.
Texte établi d'après BCDE et ab. Graphies de C.
In nomine sanctae et individuae Trinitatis. Rodulphus, ejusdem Dei omnipotentis gratia et misericordia rex. Superna provisione rectoris seculorum et gubernatoris omnium temporum collatam nobis immeritis cognoscimus et credimus et confitemur regiam potestatem. Ideo gratificamus, ipsius largissimam pietatem petentes, ut commissa nobis regni sceptra ad ejus dirigamus voluntatem et ecclesiam illius pro qua proprium sanguinem fudit, eodem juvante, protegamus, credentes quia nihil hac oblatione illi gratius unquam offerre valemus, quod in hac vita nobis salutarius, et in aeterna retributione gloriosius provenire possit. Quapropter noverit omnium fidelium sanctae Dei Ecclesiae nostrorumque tam presentium quam futurorum solertia, quoniam quidam noster abbas, nomine Aymo, ex monasterio Sancti Martini, quod est situm in suburbio Edue civitatis, ad nostrae accedens sublimitatis magnificentiam innotuit nobis, qualiter praecepta a regibus et imperatoribus, nostris videlicet antecessoribus, ex capite abbatiae et rebus praenominati coenobii edita haberet, deposcens nostram serenitatem ob majoris firmitatis plenitudinem, ut eisdem praeceptis nostrae authoritatis praeceptum superadderemus. Cui assensum praebentes, ob amorem Dei sanctique Martini, et remedium genitoris genitricisque nostre et nostrum dilectaeque nobis conjugis Ymmae, per cujus deprecationem egimus, hoc preceptum nostrae celsitudinis fieri illique dari jussimus, per quod confirmamus eidem loco, quae ab aliis regibus sunt prius concessa : in pago videlicet Augustidunensi villam Cellam cum omnibus appendiciis et Tylium et Braniacum cum Fabricis et Meletaco et Vitrarias de Novo Vico, cum omnibus appendiciis ; et in pago Cabillonensi, Canabas et Granias ; et in pago Alsensi, Cussiacum ; et in pago Avalensi, Girellas et Tarridum, cum omnibus ad eas pertinentibus ; et in pago Nivernensi, Buznacum et Casanias et Sanctum Salvium et Cambortum, cum omnibus appendiciis ; et in pago Bituricensi, Columbarium et Aloiacum et Porcariorum cum omnibus appendiciis ; et in pago Viennensi, Tortilianum cum appendiciis ; et in Provincia, in comitatu Forojuliensi, Verzemonium ; et in comitatu Orationensi, Besentianum et Muleriacum ; et in pago Aurelianensi, villam Pinus et Roborem ; et in praedicto pago Augustidunensi, Montem Ursarium cum appendiciis, sed et lacum qui est subtus Tilium villam, in prospectum Carbonaci super fluvium Aturavium, cujus una ripa Sancti Martini erat, altera vero nostra ex Carbonaco, quem dilecta nobis conjunx, nostro impetrato assensu, in eleemosina nostra suaque eidem sancto contulerat cum campo sibi adhaerente ; sed et capellam Sanctorum Geminorum sitam extra muros Eduos, cum appenditiis, quae legali commutatione praescriptus noster abbas adquisierat, deprecante nos nostro fideli Berengario, qui ea a nobis habebat in beneficium, ut liceret illud dare abbati et fratribus et accipere ex terra Sancti Martini in recompensationem tantum quantum dabat pro utrorumque oportunitate ; cuncta quae ad ipsas res superius memoratas juste et legaliter permanent, eidem abbati jure beneficiario in vita sua habendum ac regulariter ordinandum concedimus. Post cujus decessum, volumus, eo rogante et primoribus loci, ut Hugo loco ejus succedat, et post eum ipsi monachi abbatem sibi canonice et regulariter eligant ; eadem vero abbatia sub immunitatis nostrae munimine maneat, et ab omni servitio, nisi divino nostroque, libera existat, et quicquid per nos successoresve nostros eidem largiri restituique libuerit, sub praefata immunitate consistat. Ut autem haec nostrae munificentiae largitio firmior habeatur et inviolabilius per futura tempora conservetur, manu propria eam firmavimus et annuli nostri impressione subter sigillari jussimus.
Signum Rodulphi (Monogramma) gloriosissimi regis.
Ragenardus notarius ad vicem Abbonis episcopi recognovit et subscripsit.
Datum VIII idus aprilis, indictione XII, anno I regnante Rodulpho rege glorioso. Actum Cabillono civitate. In Dei nomine feliciter. Amen.
(Locus sigilli)