886, 15 octobre-887, 11 janvier. — Vienne.

Acte faux

Boson, roi des Burgondes et des Ausones, à la requête d'Asmondus, évêque de Maurienne et de Suse, et de son frère Leotmannus, évêque de Crémone, donne à l'église de Maurienne, ruinée par les invasions ennemies, le château d'Hermillon sur l'Arc, avec la chapelle Notre-Dame, en confirmant l'union de la cité de Suse à l'évêché de Maurienne.

Référence : Maurice Prou et René Poupardin (éd.), Recueil des actes des rois de Provence (855-928) : Charles de Provence, Boson, Louis l'Aveugle, Paris, 1920, no27.

A. Original perdu.

B. Copie de la fin du xie s., ou du début du xiie, à la suite d'un bénédictionnaire du ixe s., Bibliothèque de Carpentras, ms. 65 (ancien 74), fol. 48 v°.

a. Martène et Durand, Amplissima collectio, t. I, p. 221, d'après B.

b. Recueil des historiens de la France, t. IX, p. 672, n° v, d'après a.

c. Angley, Histoire du diocèse de Maurienne, p. 451.

d. Champollion-Figeac, Documents historiques inédits, t. III, p. 428, n° xiv, d'après une copie d'O. Vitalis, bibliothécaire de Carpentras, faite d'après B.

e. Mgr. A. Billiet et abbé Albrieux, Chartes du diocèse de Maurienne (Documents publiés par l'Académie..… de Savoie, t. II, 1861), p. 5, n° i, d'après a b.

f. Monumenta historiae patriae. Chartae, t. II, col. 12, n° vi, d'après «une copie existante dans les archives de l'évêché de Maurienne».

g. Dessaix, La Savoie historique et pittoresque, t. I (seul paru), p. 134, d'après f.

h. Hauréau, Gallia christiana, t. XVI, instrumenta, col. 292, n° iv, d'après f.

Traduction : Terrebasse, Histoire de Boson et de ses successeurs, p. 130.

Indiqué : Bréquigny, Table chronologique, t. I, p. 339.

Indiqué : Philipon, Le second royaume de Bourgogne, dans Annales de la Société d'émulation de l'Ain, 1896, p. 254.

Indiqué : U. Chevalier, Regeste Dauphinois, n° 858.

I. Le diplôme de Boson pour l'évêché de Maurienne est d'une fausseté manifeste, déjà signalée par M. Philipon (ouvrage cité, p. 255). La formule Ego quippe Boso…, le titre de roi des Burgondes et des Ausones, sont inadmissibles. La présence, au début de l'acte, de la phrase qui commence par les mots regnante Deo est contraire à tous les usages, non pas seulement de la chancellerie de Boson, mais de toutes les chancelleries royales du ixe siècle. Il en est de même de l'indication de la date en tête du document, comme dans un procès-verbal d'assemblée, de tout le style de la pièce, en particulier du long développement sur l'étymologie du nom d'Armariolum, de la citation des décrets du pape Boniface Ier, empruntée, semble-t-il, aux Capitulaires de Benoît Lévite (II, 405; Migne, Patr. lat., t. 96, col. 797; cf. Jaffé, Regesta, n° 357), de la fixation d'une amende contre le violateur éventuel de l'acte. Enfin les deux évêques mentionnés dans le diplôme sont l'un et l'autre inconnus.

II. L'acte est connu par une copie de la fin du xie ou du début du xiie siècle. Il a donc été fabriqué au plus tard à cette date. Mais, en raison de la pauvreté des sources relatives à l'histoire du pays de Maurienne durant la première partie du moyen âge, il est très difficile de déterminer l'époque et les circonstances de la confection du faux.

Cependant on sait que la vallée de Suse, jadis rattachée à l'évêché de Turin, avait été, lors de la conquête du pays par les Francs, annexée à celui de Maurienne (Longnon, Atlas historique de la France, p. 142). Au début du xe siècle, une bulle de Serge III, du 18 juin 908, confirme la soumission au métropolitain de Vienne de l'église de Maurienne «una cum ecclesia Segusiana» (Migne, Patr. lat., t. 131, p. 978; Jaffé, Regesta, n° 3544). Mais, dès cette époque, on sent le besoin de consolider cette situation par des faux (Manteyer, La Provence du ier au xiie siècle, p. 496). Dans la seconde moitié du xie siècle, les évêques de Turin revendiquent, parfois victorieusement, la possession du pays de Suse (Mgr. A. Billiet, Mémoire sur les premiers évêques de Maurienne, p. 53 et suiv.). Le faux diplôme de Boson insiste sur l'union de Maurienne et de Suse; le rédacteur introduit à la fin, assez maladroitement, une clause relative à cette situation, clause tout à fait étrangère à l'objet propre de l'acte, qui est la donation à l'évêché de Maurienne du château d'Hermillon. Le style de la pièce est celui du xie siècle, bien plutôt que celui de la fin du xxe. Le regnante Deo, le hors-d'œuvre étymologique, les formules finales, n'auraient rien de particulièrement insolite dans un acte de l'année 1050 environ. Il est donc peut-être permis de supposer que le diplôme de Boson aura été fabriqué vers cette époque, pour être produit au cours des contestations entre les deux évêchés de Maurienne et de Turin.

L'acte se présente comme appartenant à la huitième année du règne de Boson. Sa date devrait donc être placée entre le 15 octobre 886 et le 14 octobre 887. Mais Boson mourut le 11 janvier 887. C'est donc cette date qu'il faut adopter comme terminus ad quem.


Regnante Deo factore omnium, qui cuncta suo disponit ordine, cujus nutu ac potestate reges regnant, qui nobis beneficio suȩ misericordie regni gubernacula non nostris intervenientibus meritis concessit. Ego quippe Boso, Burgundionum Ausoniorumque rex, una cum Er. uxore, pariter aula Vienne positi, anno regni octavo, coepimus cogitare piorum ac improborum retributionem, qualiterque remedio elimosine cassantur imminentia bella injuste insurgentia vel qualiter adquiritur, elemosina interveniente, misericordia Salvatoris. Interfuit quoque noster dilectus Asmundus, Secusivȩ civitatis vel Maurianorum episcopus, una proprio fratre Leotmanno, Cremonensis ecclesie presule, qui nobis meditata ac mutuo dicta suadentes, ditari regalibus opibus ecclesiam proprii episcopii sancti Johannis Baptiste, in confinio Burgundie positam, que admodum destituta esse cognoscitur sevicia hostium euntium vel redeuntium. Nos vero in amministratione tanti negotii assensum prebuimus, veneratione sancti predicti Johannis Baptiste, utque nos victores intercessione semper ubique reddat, donamus eidem sancto Domini Baptiste refugium de nostris propriis genealogiis, castrum scilicet in ejusdem territorio sancti Johannis positum, quod a vulgo Armariolum nuncupatur, quod etiam adjacet supra dicti parvi fluminis ripam Arki, cum nostra capella sanctȩ Dei genetricis, cum decimis et villis, villaribus subjectis eidem castro pertinentibus et ex hac parte fluminis et ultra, ubi sit presulis requies, ubi secunda sedes, ubi tempore belli tuta defensio, ubi libros thesaurorumque munimen inexpugnabile armarium enim antiquitus antiqui vocaverunt, aptum et congruum judicatur a regalibus institutis, ut sit arma inexpugnabilis contra hostium incursiones nostrȩ Mauritane ecclesiȩ, sancti videlicet Johannis Baptistae. Si quis vero, suadente humani generis inimico, contra institutionem nostrae potestatis violare temptaverit, lege Bonifaci universalis pontificis sit anathema et componat nostro judicio C libras auri. Has quippe duas ecclesias, Maurianorum scilicet sancti Johannis Baptistae sanctȩque Dei genitricis civitatis Secusivȩ, cum propriis ecclesiis subjectis, secundum jamdicti Bonifacii instituta, esse concedimus Maurianensis ecclesiȩ pontificis dominatu, eo tenore ut ad proprii pontificis sinodum constituto tempore veniat sepe denominatus Maurianorum episcopus.


Localisation de l'acte

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